L'affaire Erignac ne fait que commencer pour la justice
Jul 14, 2003
Auteur: L'investigateur

Les lourdes condamnations prononc�es vendredi � Paris contre huit accus�s de l'assassinat du pr�fet de Corse Claude Erignac n�ont pas clos loin s�en faut, le long parcours judiciaire du dossier. De nombreuses �tapes, sortes de m�tastases judiciaires, vont le jalonner avec toujours plus de risques pour paix et la s�curit� publique.

Les avocats de sept des huit hommes ont annonc� leur intention de faire appel. Il est vraisemblable qu�Alain Ferrandi s�en tiendra � sa condamnation � perp�tuit� puisqu�il a r�ussi � �chapper � une peine incompressible qui pourrait lui �tre administr�e en appel. La Cour sp�ciale d�Assises a en effet remplac� la Cour de S�ret� de l��tat, mise en place au lendemain de la guerre d�Alg�rie par le r�gime gaulliste et dissoute en 1981. L�ironie de l�histoire c�est que la Cour de S�ret� de l��tat �tant ouvertement politique, il e�t mieux valu pour les Corses mis en examen, pour des attentats ou des meurtres, �tre jug�s par une juridiction politique plut�t que par ces magistrats qui rendent des verdicts � en leur �me et conscience � et pourtant tr�s politiques.

Un nouveau proc�s sera donc organis� devant une autre cour d'assises sp�ciale dans un d�lai d'environ un an. Parall�lement, les juges d'instruction antiterroristes devraient, dans environ deux ans, renvoyer aux assises Yvan Colonna, auteur pr�sum� des coups de feu sur le pr�fet, arr�t� le 4 juillet. Ce proc�s-l�, tr�s complexe, n�arrivera pas devant la Cour avant deux ans.

S'il est condamn�, Yvan Colonna pourra faire appel. Ce sont donc pas moins de trois nouveaux proc�s qui pourraient se d�rouler dans les trois prochaines ann�es � Paris et ailleurs, pour cette affaire qui a d�j� boulevers� justice, police et pouvoirs publics sur l'�le et sur le continent depuis 1998.
Le premier proc�s s'est achev� vendredi apr�s six semaines de d�bats sur un go�t d'inachev�, puisque les condamnations ont �t� prononc�es alors que les accus�s niaient les faits ou refusaient, lorsqu'ils les reconnaissaient, de s'expliquer en d�tail sur leur r�le. Nous avons soulign� les carences importantes du pr�sident et des avocats g�n�raux. Un proc�s b�cl�, des accus�s ayant quelques difficult�s � simplement expliquer leur geste sinon par le sentiment qu�ils avaient � que l��tat fran�ais � �tait coupable, un verdict sans grande coh�rence et la condamnation de trois accus�s qui ont toujours cri� leur innocence sans d�autres � preuves � que les d�clarations de policier et les � aveux � faits sans violence par quelques-uns des accus�s lors de leur garde-�-vue.

Alain Ferrandi, 42 ans et Pierre Alessandri, 44 ans �taient de fait condamn�s � l�avance puisqu�ils avaient admis en 1999 avoir accompagn� armes en main Yvan Colonna le 6 f�vrier 1998 � Ajaccio.
Leur condamnation n�est donc pas choquante sinon que la perp�tuit� pour des hommes qui n��taient que des complices, repr�sente une peine un peu lourde. Mais il est vrai que les condamnations � perp�tuit� se voulaient symboliques.

Que pourrait donner un proc�s en appel ? Rien de plus que le pr�c�dent. Seul le verdict pourrait changer si la donne politique a chang� d�ici l�.

Mais que d�erreurs commises par laisser-aller. D�abord cette confusion entre le r�f�rendum et le proc�s. Selon des informations il s�agit d�un oubli de l�entourage de Sarkozy. Il a donc fallu faire � durer � le proc�s donnant une impression de langueur insupportable. Avec l�arrestation d�Yvan Colonna, le pr�sident avait une chance de rattraper ses propres erreurs. En refusant d'arr�ter le proc�s des huit nationalistes et de le reporter sine die pour qu'ils puissent �tre jug�s en m�me temps qu'Yvan Colonna si ce dernier �tait amen� � �tre renvoy� devant les assises, la cour d'assises sp�ciale de Paris a d�finitivement priv� la justice d'une confrontation g�n�rale publique.

Le fait d�avoir voulu terminer ce proc�s alors qu�Yvan Colonna avait �t� pris, tout cela contribue � rendre quasi impossible la recherche de la v�rit� � savoir : qu�est-ce qui s�est bien pass� avant et apr�s l�assassinat ? Qui �tait ce myst�rieux groupe Sampiero qui semblait en savoir autant ? Qu�elles �taient les relations entre les hommes du sud et ceux du Nord ? Si Castela et Andriuzzi n��taient pas les hommes du Nord qui �taient-ils ? Qui a �crit les communiqu�s ? etc. etc. Mais surtout qui a tu� le pr�fet Erignac ?

La justice a rat� toutes ces cibles en transformant ces hommes m�diocres en des � symboles � du nationalisme corse eux qui avaient �t� proprement balanc�s par le FLNC Canal historique. Avouons que la d�fense globale oppos�e par la plupart des accus�s et l�incompr�hensible ligne de d�fense de ma�tre Stagnara ont fait le reste.

Peut-�tre (mais ne r�vons pas) en apprendra-t-on un peu plus lors des auditions d�Yvan Colonna.

Dossier Erignac

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