Ouvrir dans une nouvelle fen�tre Quand la France formait les tortionnaires d�Am�rique Latine sur ordre des �tats-Unis
Sep 4, 2003

Le film de Marie-Monique Robin Les Escadrons de la mort : l'�cole fran�aise qui passait lundi sur Canal+ nous en appris de belles. C�est la France et personne d�autre qui a export� dans les ann�es 1960 et 1970 en Am�rique du Sud les techniques d'interrogation des prisonniers, torture, quadrillage de la population.

La journaliste d�crit, en �tayant sa th�se, comment les militaires fran�ais ont form� les tortionnaires d�Am�rique latine et des �tats-Unis pour ce qui concerne la guerre contre-r�volutionnaire et les m�thodes d�interrogatoires. Plus horrible encore, ce sont eux qui ont enseign� comme terroriser des populations en faisant dispara�tre les prisonniers, en les ex�cutant de mani�re sommaire et en abandonnant leurs cadavres sur les routes. Autant de � trucs � appris sur le tas en Indochine et en Alg�rie mais reprises des m�thodes de contre-gu�rilla des nazis et de la milice.

Fiers de leur savoir-faire et partageux, les officiers fran�ais ont donc essaim� � travers le vaste monde pour partager ce pr�cieux bagage intellectuel. Et comme les �tats-Unis cherchaient � briser la gu�rilla en Am�rique latine c�est essentiellement aux militaires sud-am�ricains qu�ils ont transmis leur talent.

Cela a commenc� � l'�cole des Am�riques, install�e dans la zone du canal de Panama, immortalis�e par � �tat de si�ge � de Costa Gavras. L�, des tortionnaires en herbe mais d�sireux d�apprendre �coutaient bouche b�e des militaires fran�ais, leur apprendre comment cr�er des zones tampon, passer un suspect � l��lectricit�, torturer son enfant devant lui. Les m�thodes fran�aises, qui avaient pourtant �chou� en Indochine puis en Alg�rie, ont ainsi servi au Guatemala, au Salvador, en Argentine, au Br�sil.

"Nous avons tout appris des Fran�ais", explique le g�n�ral Albano Harguindeguy, qui fut en Argentine le ministre de l'int�rieur de la junte militaire dirig�e par le g�n�ral Videla dans ce film rare.

Et l�exemple toujours cit� par les tortionnaires est celui de la bataille d�Alger. Et un nom revient comme un gimick de cauchemar : celui du g�n�ral Aussaresses, l�homme des escadrons de la mort fran�ais � Alger.

D�abord instructeur dans le haut lieu des B�rets Verts � Fort Bragg, Aussaresses a appris � ses pairs am�ricains comment d�truire son prochain pour tous les moyens les plus d�gueulasses qui soit. Les Am�ricains s�en sont grandement servis au Vietnam, grande �cole de la contre-r�volution.

Ce grand sp�cialiste de la torture a ainsi enseign� au Br�sil en 1973 o� il se trouvait comme attach� militaire. C��tait au plus fort de la r�pression. C��tait aussi la grande p�riode la CIA qui fabriquait des coups d��tat partout o� le pouvoir risquait d��chapper � ses cr�atures. Ainsi il y a exactement 30 ans, un complot militaire menait le g�n�ral Pinochet au pouvoir apr�s l��crasement du pouvoir de Salvador Allende, d�mocratiquement d�sign� par les �lections.

Dans le film Le g�n�ral Manuel Contreras, qui fut le chef de la police secr�te de Pinochet, la DINA de sinistre m�moire, r�v�le que de nombreux officiers chiliens, en stage au Br�sil, plus pr�cis�ment � Manaus en Amazonie, ont re�u le savoir d'Aussaresses. Pire, El � Mamo � comme on le d�signait, nous apprend que les officiers fran�ais ont directement collabor� avec la dictature chilienne en de nombreuses occasions.

Contreras donne des pr�cisions : la DST, le contre-espionnage fran�ais a directement inform� leurs � coll�gues � de la police secr�te chilienne du retour de certains r�fugi�s. Ceux-ci �taient alors cueillis, tortur�s et disparaissaient.

Les �mules d�Aussaresses ont aussi s�vi dans l�Argentine du dictateur Videla puis, dans le cadre du plan Condor. C'�tait une op�ration d�envergure continentale consistant � traquer et � faire dispara�tre les opposants d�Argentine, du Chili et d�Uruguay. En vertu d�un accord bilat�ral datant de 1959, une mission militaire fran�aise permanente s��tait install�e � Buenos Aires. Travail : la torture. On imagine la schizophr�nie des tortionnaires fran�ais lorsque leur propre pays a port� plainte contre leurs amis tortionnaires argentins apr�s la disparition et l�assassinat de deux religieuses fran�aises qui militaient avec les Folles de la place de mai.

Aussaresses a donc export� une � exception culturelle fran�aise � reconnue par les poids lourds des dictatures sud-am�ricaines comme les g�n�raux Reynaldo Benito Bignone, Ram�n D�az Bessone o Albano Harguindeguy.

� Le g�n�ral Aussaresses nous a expliqu� la torture � avoue beno�tement le g�n�ral am�ricain Carl Bernard qui fut l�un de ses � �l�ves � � Fort Bragg, camp d�entra�nement des forces sp�ciales des �tats-Unis.
.L'�tat fran�ais, employeur d�Aussaresses, �tait �videmment au courant de ce que ce dernier et ses pareils faisaient en Am�rique du Sud. Le coup d��tat au Chili a trente ans. Il serait peut-�tre temps de demander des comptes aux dirigeants fran�ais, non seulement militaires mais civils.

Au fait le pr�sident Giscard, qui accouche actuellement d�une constitution mod�le pour l�Europe, �tait bien le pr�sident de la r�publique fran�aise et, � ce titre, le chef des Arm�es..

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