Ouvrir dans une nouvelle fen�tre 1986, l�ann�e de tous les attentats
Aug 26, 2003

1 - Les attentats de d�cembre 1985 et la criminalisation :

A priori, dans la continuit� des attentats du 23 f�vrier 1985 (magasin Marks & Spencer : 1 mort, 14 bless�s) [4] et du 9 mars (cin�ma Rivoli Beaubourg : 18 bless�s), le double attentat des magasins "Galeries Lafayette" et "Printemps Haussmann", le 7 d�cembre (43 bless�s), ouvre, semble-t-il, une nouvelle s�rie d'attentats qui, en quatre vagues, frappera la France jusqu'en septembre 1986 [5].

Mais, au d�part, les enqu�teurs ne pourront le deviner et s'orienteront vers deux pistes principales : la premi�re sera celle du groupe Abou Nidal en raison des soup�ons pesant sur la responsabilit� de ce groupe dans l'attentat Mark & Spencer.

La seconde, privil�gi�e officiellement, sera celle d'un acte commis par un d�s�quilibr� comme dans les attentats du BHV. � l'appui de cette derni�re th�se, les enqu�teurs avan�aient le caract�re artisanal des engins incendiaires (bidons d'essence avec un peu de mati�re explosive et un petit d�tonateur actionn� par un r�veil), et une tentative identique l'ann�e pr�c�dente au moment des f�tes de No�l. De plus, aucune revendication cr�dible n'�tait apport�e sinon un coup de t�l�phone du Front de lib�ration de la Palestine/groupe Abou Abbas et un autre de l'ASALA.

Le juge Marsaud, charg� de l'enqu�te, �tait pourtant d'un avis diff�rent et sceptique sur cette th�se de l'acte d'un fou, qui arrangeait les autorit�s. En effet, la mati�re explosive retrouv�e �tait du C4 comme au Liban et l'on d�couvrait aussi des fragments d'un journal kowe�tien Al Quabas qui enveloppait la machine incendiaire.

L'hypoth�se du Djihad islamique devenait alors cr�dible. N�anmoins, rien ne venait confirmer mat�riellement cette croyance. Il faudra attendre les attentats de f�vrier 1986 pour que l'hypoth�se prenne corps.

2 - Les attentats de f�vrier 1986 et la piste iranienne


Le 3 f�vrier 1986, un attentat � la galerie marchande de l'H�tel Claridge situ� sur les Champs-�lys�es, faisait 8 bless�s et �tait revendiqu� par le "Comit� de solidarit� avec les prisonniers politiques arabes et du Proche-Orient", ou "CSPPA".

Le m�me jour, une tentative d'attentat par explosif �tait d�couverte dans les toilettes du troisi�me �tage de la Tour Eiffel. �tait-ce un rat� technique ou un avertissement ? Les hypoth�ses se multiplieront, toujours est-il que l'on remarquera dans chaque s�rie d'attentats au moins un rat� ; ce qui aura, outre l'absence de victimes, des cons�quences positives pour l'enqu�te qui disposera de plus de mat�riaux techniques d'identification.

Le lendemain, 4 f�vrier, une explosion ravageait la librairie Gibert Jeune faisant 5 bless�s et le 5 f�vrier une autre frappait le magasin FNAC Sport du Forum des Halles faisant 22 bless�s. Les deux attentats �taient aussi revendiqu�s par le CSPPA.

Bien que l'on �voque au d�part des vengeances d'employ�s pour la librairie Gibert, tr�s vite cette fois l'enqu�te s'oriente vers les milieux chiites iraniens, tunisiens et libanais en France, ainsi que vers le Kowe�t peupl� de tr�s nombreux Chiites iraniens (une commission rogatoire internationale est demand�e � l'�poque).

Une s�rie d'interpellations est ordonn�e le 14 mars par le juge Marsaud � la suite de l'attentat de la galerie Claridge. Elle vise de nombreuses personnes appartenant au foyer Ahl El Beit, foyer qui sert de lieu de rendez-vous � l'int�grisme chiite, et qui fut dirig� par le fr�re de Cheikh Fadlallah [6].

Mais aucune charge ne peut �tre retenue contre les personnes interpell�es qui seront lib�r�es et expuls�es. En effet, ce n'est que bien plus tard que l'on apprendra que l'on avait appr�hend� en m�me temps les principaux responsables du r�seau logistique des attentats et le poseur de bombe.

Comme en d�cembre 85, les attentats sont commis avec des moyens artisanaux, poubelle pi�g�e au Claridge� et sur la base d'un explosif, le C4, m�lange d'octog�ne et d'hexog�ne. La DGSE r�v�lera qu'il s'agit du m�me explosif que celui qui avait �t� employ� pour d�truire une voiture devant l'ambassade de France au Liban le 12 d�cembre 1983.

Le gouvernement fran�ais prend alors la mesure des �v�nements et ne cherche plus, comme en d�cembre, � les dissimuler en les criminalisant. Il estime qu'il s'agit d'un message du Djihad essentiellement li� � la lib�ration des membres de son organisation emprisonn�s au Kowe�t, et dont on vient d'annoncer la condamnation � mort, ainsi qu'une pression suppl�mentaire sur la France pour qu'elle lib�re Anis Naccache, puisque le marchandage des otages fran�ais au Liban ne semble pas suffisant.

La presse r�v�lera, quant � elle, que ce changement de politique gouvernementale tient au fait que le 5 janvier 1986 �tait pr�vue une lib�ration de nos otages contre l'ensemble du commando Naccache et la lib�ration des prisonniers du Kowe�t.

Officiellement le gouvernement refusa la transaction d�voil�e par la presse six mois plus tard car il consid�rait excessive les exigences du Hezbollah mais une th�se officieuse voudrait que l'opposition de droite de l'�poque ait sabot� la transaction en proposant d'accepter toutes les conditions lorsqu'elle arriverait au pouvoir. Elle y acc�de le 16 mars avec une tr�s courte majorit� � l'Assembl�e Nationale. Le 17 mars les attentats recommencent.

3 - Les attentats de mars 1986 et la piste Abdallah

Le 17 mars, date de la nomination de Jacques Chirac comme Premier ministre, un attentat vise le TGV, alors qu'il circulait � hauteur de Brunoy, et fait 9 bless�s. Le 20 mars, une bombe explose dans la galerie Point Show des Champs-�lys�es faisant 2 morts dont Nabil Dagher fich� comme membre des FARL et 29 bless�s.

Le m�me jour, une tentative d'attentat est d�jou�e de justesse � la station Ch�telet du RER, un des voyageurs �tant intrigu� par un paquet suspect. Une fois encore tous ces attentats, sauf ceux rat�s, sont revendiqu�s par le CSPPA et le C4 entre dans leur composition. Sans indice, la police et le nouveau gouvernement fran�ais restent impuissants devant la troisi�me vague d'attentats de 1986, d'autant qu'imm�diatement au pouvoir, ils multiplient les contacts avec les ravisseurs des otages, font des concessions et croient que les Iraniens leur en sont reconnaissants [7].

D�s lors l'enqu�te s'oriente vers d'autres pistes d�laiss�es et privil�gie cette fois l'hypoth�se du clan Abdallah dont le fr�re Georges Ibrahim est sous les verrous de la justice fran�aise malgr� des promesses officieuses de lib�ration en contrepartie du fils de l��crivain Gilles Perraut rel�ch� par les FARL.

Persuad� que la famille Abdallah, flou�e par ce march� de dupes [8], est derri�re ces attentats, le gouvernement prend des contacts avec les Alg�riens et les Syriens pour qu'ils calment les FARL et les surveillent.

Or, � partir de cette date, une accalmie semble enfin se produire, comme si la commission des attentats avait partie li�e avec les p�rip�ties du proc�s de Georges Ibrahim Abdallah.

C�est cette piste que privil�gieront pour le quotidien Le Monde, Edwy Plenel et pour le Canard Encha�n�, Georges Marion. Tous deux ont en commun d�avoir �t� des employ�s du journal Rouge de la Ligue Communiste R�volutionnaire. Mais surtout Plenel est l�ami de Bernard Delplace, dirigeant syndical policier.

La DST lui a souffl� la piste Adbdallah qui arrange tout le monde puisqu�elle �loigne de la piste iranienne. Plenel et Marion se lancent � fond dans cette hypoth�se. Ils s�en mordront les doigts et reconna�tront plus tard � demi-mot avoir �t� manipul�.

4- Les attentats de septembre 1986 et la piste syro/abdalienne

Du mois d'avril au mois d'ao�t, le nouveau gouvernement fran�ais respire. Il pense avoir trouv� la solution pour pr�venir les attentats � Paris en faisant surveiller les Abdallah par les Syriens. Aussi, la quatri�me vague d'attentats, de loin la plus meurtri�re, le prendra-t-elle totalement au d�pourvu et provoquera-t-elle le sentiment d'avoir �t� trahi par la Syrie. En effet, l'organisation ou les organisations qui s'abritent derri�re le sigle CSPPA, recommencent � frapper Paris comme jamais auparavant.

La s�rie s'ouvre par un attentat rat� dans le RER � la station Gare de Lyon le 4 septembre. Quatre jours plus tard, le 8 septembre, un attentat vise le bureau de poste de l'H�tel de ville de Paris faisant 1 mort et 21 bless�s. Quatre jours apr�s, le 12 septembre, un attentat frappe les locaux de la Caf�t�ria Casino au Centre commercial de la D�fense et fait 54 bless�s.

La s�rie s'intensifie encore avec des dates plus rapproch�es. Le 14 septembre, un attentat est d�jou� au Pub Renault sur les Champs-�lys�es mais 2 policiers et 1 serveur sont tu�s et un autre serveur bless� par l'explosion de l'engin d�plac�.

L'attentat, sinon, aurait fait beaucoup plus de victimes. Le 15 septembre, un attentat vise les locaux du Service des permis de conduire de la pr�fecture de police � Paris faisant 1 mort et 56 bless�s. Enfin le 17 septembre, l'attentat commis devant le magasin Tati, rue de Rennes clos la s�rie, et se r�v�le le plus meurtrier de tous : 7 morts et 55 bless�s.

Tous ces attentats sont revendiqu�s par le CSPPA et par un groupe qui s'intitule "Partisans du droit et de la libert�". Le gouvernement effar� par la violence de ces attaques ne sait plus que penser et a du mal � imaginer qu'une famille libanaise puisse, pour faire lib�rer un fr�re emprisonn�, aller jusque-l�.

On suppose tr�s rapidement qu'il a fallu des soutiens �tatiques importants pour cette campagne d'attentats et toutes les pistes redeviennent ouvertes : action iranienne par l'interm�diaire du Hezbollah, vengeance des fr�res Abdallah plus ou moins aid�s par d'autres organisations comme l'ASALA, action syrienne par l'interm�diaire des FARL�

Cette derni�re hypoth�se sera privil�gi�e tant dans les m�dias que dans les discours des premiers jours du gouvernement fran�ais, o� le langage guerrier fait des ravages.

Seulement, face aux protestations syriennes, le gouvernement revient tr�s vite � la th�se des fr�res Abdallah sans soutien syrien, au grand d�plaisir des m�dias, et se tiendra � cette th�se jusqu'� la d�couverte des v�ritables responsables de tous ces attentats : le r�seau Ali Fouad Saleh [9].

Les auteurs des attentats


La nouvelle s�rie pr�vue en 1987 :

Peu apr�s la condamnation � perp�tuit� de Georges Ibrahim Abdallah, une nouvelle s�rie d'attentats �tait pr�vue. Elle devait ensanglanter � nouveau Paris. � cet effet, le responsable du groupe Ali Fouad Saleh devait recevoir de Mohamed Ali Hamade, en Allemagne, du nitrate de m�thyle, explosif liquide tr�s instable, mais tr�s puissant.

�tant donn� l'importance des stocks retrouv�s, la s�rie pr�vue aurait �t� sans doute bien plus longue et bien plus sanglante que celle de septembre [10]. Mais la DST r�ussira � interpeller les coupables avant qu'ils ne commettent de nouveaux attentats et elle d�mant�lera le r�seau logistique de l'organisation travaillant en France en retrouvant quasiment toutes leurs caches.

Gr�ce � ce succ�s dont la police et le gouvernement avaient bien besoin, on sut mieux comment les autres attentats avaient �t� r�alis�s, puisque, parmi les personnes interpell�es, certaines admirent que leur groupe �tait responsable sur le plan logistique de l'ensemble des op�rations men�es sur le territoire fran�ais depuis d�cembre 1985.

Pourtant la presse, si elle applaudit � l'arrestation des coupables, ne revint pas sur les interpr�tations erron�es qui l'avait guid�e depuis plus d'un an (mars 1986 - juin 1987) et, finalement, on se rend compte que l'information sur les v�ritables coupables des attentats a �t� bien moins importante que celle sur les fausses pistes [11].

La taupe de Fontainebleau

Au d�part, la d�couverte du groupe Ali Fouad Saleh repose sur deux indices diff�rents qui se recouperont. Tout d'abord, une des personnes interpell�e en f�vrier 1986, nomm�e Lofti Ben Khala, et plus ou moins suivie par les Renseignements g�n�raux depuis, vint se pr�senter en f�vrier 1987 pour proposer des renseignements sur les attentats de septembre, moyennant finances.

Lofti aurait �t� en contact avec les Iraniens (Rechari et Rafigh Doust) � T�h�ran. Ce dernier aurait parl� d'un "plan" �labor� par les Iraniens pour frapper la France en r�ponse au pr�t par celle-ci des Super �tendards � l'Irak afin de d�truire le terminal p�trolier iranien de Kharg, et aurait fourni un document iranien faisant l'�loge des actions clandestines men�es � Paris par le Hezbollah [12].

Lofti, revenu en France, et fort de ses contacts iraniens, r�ussit alors � s'infiltrer au sein du r�seau clandestin et d�signe � l'attention des services de police un groupe d'individus qui avait un appartement au 44 bis rue de la Voute dans le 12�me arrondissement, appartement qui �tait officiellement une �cole coranique.

La DST pose des �coutes t�l�phoniques et des micros et le 21 mars 1987, apprend que les membres du r�seau vont d�placer les explosifs stock�s dans l'appartement. Une discussion s'en suit pour savoir s'il faut remonter la fili�re le plus longtemps possible ou les arr�ter compte tenu du risque qu'ils repr�sentent.

M. Pandraud choisit cette derni�re solution et la DST arr�te les principaux responsables du groupe Ali Fouad Saleh, c'est-�-dire lui-m�me, un employ� de restaurant Mohamed A�ssa et un chauffeur de taxi, Hassan Aroua. Dans le flagrant d�lit on trouve des bouteilles d'explosif liquide identiques dans leur conditionnement � celui du groupe Hamade en Allemagne.

Le lendemain les interpellations se poursuivent : On arr�te la femme d'Ali Fouad Saleh, Karima Fehari ; Mohamed Mouhajer, ex-responsable du Centre culturel iranien de la rue Jean Bart, ferm� en 1983 et libraire depuis [13] ; un g�rant de soci�t� de parfums, Fetih Bourguiba, ami d'Ali Fouad Saleh, (plus deux autres personnes qui seront tr�s vite rel�ch�es). Hassan Aroua et Fetih Bourguiba, d�s le premier jour de l'arrestation, chargeront Ali Fouad Saleh et reconna�tront le r�le du groupe dans les attentats de septembre.

Ils indiqueront aussi � la police le nom de code de plusieurs Libanais qui auraient, eux, commis directement les attentats puis seraient repartis. Parall�lement � ces �v�nements, les services fran�ais recevaient de leurs homologues ouest-allemands, en janvier 1987, des renseignements concernant les liens qui existeraient entre le groupe Hamade arr�t� en RFA le 13 janvier pour d�tention d'explosifs et le groupe fran�ais [14].

Selon le Bundeskriminalant [15] les explosifs d'Hamade �taient destin�s au groupe parisien apr�s un passage par Frankfort et auparavant par Chypre et le Liban.

Le groupe Hamade en RFA avait en effet comme mission, semble-t-il, d'approvisionner en armes et en argent les autres groupes europ�ens et l'on retrouvera plusieurs num�ros de t�l�phone du groupe Fouad Saleh chez Hamade : tout d'abord celui de Ali Fouad Saleh lui-m�me sous le pseudonyme d'Ali el Tounsy (le Tunisien), ensuite celui de Mehdi Diab � l'adresse de Fetih Bourguiba, et, enfin, celui d'Hussein Mazbou sous la fausse identit� qu'il employa � plusieurs reprises Hassan Ali.

De plus le conditionnement des explosifs, les sacs servant � les transporter et les modalit�s de falsification des passeports sont identiques dans les deux groupes.

� ce stade, il est impossible de croire � des co�ncidences. Les deux groupes Hamade et Fouad Saleh coop�raient �troitement. Le groupe Hamade convoyant les explosifs (du nitrate de m�thyle) jusqu'en France et de la drogue soit pour s'autofinancer, soit parce qu'un des fr�res Hamade au Liban dirige une fili�re de drogue.

Les arrestations du groupe Fouad Saleh

Apr�s l'arrestation du 22 mars, les policiers vont remonter la fili�re tant sur le plan des autres membres du groupe Fouad Saleh que sur celui des caches d'explosifs.

Tout d'abord, malgr� le mutisme obstin� de Fouad Saleh, ils reconstituent son itin�raire. Celui-ci, n� � Paris le 10 mai 1958, de nationalit� tunisienne, a pass� toute son enfance � Tunis qu'il ne quittera que pour l'Iran en 1982. Apr�s un bref s�jour � Qom, il revient � Tunis d'o� il repart imm�diatement pour Paris.

Tr�s li� au renouveau coranique de la capitale et � la cr�ation de nouvelles mosqu�es, il se lie d'amiti� avec Mohamed Mouhajer, �tudiant libanais en philosophie � la Sorbonne qui a suivi, lui aussi, des cours � l'universit� de Qom en Iran. Ce dernier l'aide � repartir � Qom pour un s�jour plus long et lui fait rencontrer � cet effet Vahid Gordji, attach� � l'ambassade d'Iran. Vahid Gordji obtiendra pour Fouad Saleh une bourse d'�tudes pour Qom o� il restera un an.

L�-bas ces rapports avec les autorit�s iraniennes sont sujets � controverse, toujours est-il qu'officiellement Ali Fouad Saleh est emprisonn� � la mi-1984, puis expuls� vers la France [16]. Il y arrive en mai ou septembre. Devant l'esplanade du centre Beaubourg o� il se lance dans la pr�dication, il rencontre Mohamed Mehdi, "combattant" du Hezbollah libanais.

Mohamed Mehdi revient entour� d'autres de ses amis pour �couter Fouad Saleh dont l'ardeur dans les pr�ches attire un nombre important de personnes. Il lui fait rencontrer Alaa Alaeddine, Sami Slim et d'autres membres du Hezbollah.

Parall�lement, Fouad Saleh retrouve Abdelhamid Badaoui, �tudiant marocain qu'il avait connu en 1982 et lui pr�sente certaines de ses relations, tunisiennes comme lui : A�ssa et Aroua. S'agissait-il d�s cette �poque pour lui de recruter sur ordre du Hezbollah ou ces derniers �taient-ils dans l'ignorance des attaches de Fouad Saleh avec les Libanais et le prenaient-ils simplement pour un homme inspir� par la foi religieuse ? Il est difficile de trancher.

Plusieurs membres du groupe, interpell�s par la police, se d�fendront de conna�tre exactement les activit�s de Fouad Saleh, et auraient entrepos� ses affaires sans savoir ce qu'elles contenaient. Ils auraient voulu aider un passionn� de Dieu, sans logement, vivant en vendant des fruits dans le m�tro et n'auraient pas compris qu'Ali Fouad Saleh se servait de leur hospitalit� pour entreposer chez eux des explosifs [17].

Toujours est-il que la d�lation interne entre les membres du r�seau va prendre un tour extraordinaire et va permettre � l'enqu�te de progresser rapidement. Gr�ce � l'�tude du carnet d'adresses de Fouad Saleh et aux d�clarations d'A�ssa et d'Aroua qui, imm�diatement, chargent Fouad Saleh et se disent innocents malgr� le flagrant d�lit, les policiers pourront interpeller � nouveau plusieurs personnes.

Tout d'abord, Omar Agnaou et Abdelhamid Badaoui, tous les deux Marocains. Badaoui accepte de parler s'il peut b�n�ficier de la loi des "repentis" et va encore plus loin que ceux qui s'�taient dissoci�s. Il affirmera avoir �t� tromp� par Fouad Saleh au d�part puis avoir pris peur des cons�quences ensuite lorsqu'en septembre 1986, il aurait compris enfin que son ami �tait � la t�te de l'organisation qui commettait les attentats � Paris.

Il se dit "soulag�" et accepte de t�moigner contre les autres accus�s. Il donne ainsi le nom de code d'un des op�rationnels venus du Liban, Bassam, et r�v�le une cache dans la for�t de Fontainebleau. Peut-on pour autant croire � la bonne foi de Badaoui et n'y voir qu'un individu trop confiant manipul� par le r�seau ?

Difficile. Badaoui a entrepos� chez lui, outre les sacs ayant servi au transport du C4, des connecteurs de piles identiques � ceux des attentats rat�s et surtout il reconna�tra s'�tre d�fauss� des sacs d'explosifs au profit d'Agnaou car il ne voulait pas garder ces sacs chez lui !

Agnaou reconna�tra avoir eu les sacs d'explosifs et confondra Badaoui en assurant que ce dernier l'avait pr�venu de leur nature dangereuse. La forte d�lation des membres du groupe entre eux change l'image que la presse a voulu donner du r�seau Fouad Saleh. Contrairement � une id�e re�ue et amplifi�e par les m�dias, braqu�s exclusivement sur les impr�cations d'Ali Fouad Saleh, le groupe n'est pas soud� par une croyance dans la vertu de la R�volution iranienne et par le chiisme.

Il ne s'agit nullement, au cas pr�s de Fouad Saleh, de "fanatiques". Leur foi, si elle existe, n'a rien d'exalt�e. Plusieurs ne sont gu�re pratiquants et consomment de l'alcool�

Ils sont de confessions diff�rentes : chiites et sunnites. L'examen pr�cis du dossier met � mal l'image d'un groupuscule anim� par la foi religieuse et pr�t � se sacrifier � la Cause. La faible solidarit� du groupe fait d'ailleurs h�siter sur le vocabulaire.

Seul semble-t-il Fouad Saleh est convaincu de la justesse de la cause qu'il d�fend, les autres, complices, l'aident mais feignent de ne pas comprendre la port�e de leurs actes. Tout leur syst�me de d�fense reposera sur ce point. Nous sommes loin des proc�s politiques et militants. S'agit-il m�me d'une organisation structur�e ou d'un r�seau l�che de relations ?

� part Fouad Saleh, qui agit par conviction ? A priori, personne dans le groupe des individus interpell�s de nationalit� tunisienne et marocaine [18].

� cet �gard, l'attitude des Maghr�bins recrut�s par Fouad Saleh contraste avec celle des six Libanais qui seront interpell�s. Refusant de reconna�tre une quelconque participation aux attentats, les Libanais (Alaa Alaeddine, Anwar Jomaa, Nasser Reda Hachem, Farid Roumi, Tashin Saad et Sami Slim) auront un syst�me de d�fense plus serr� et admettront simplement avoir rencontr� dans diverses occasions Ali Fouad Saleh.

Plusieurs d'entre eux fr�quentent le foyer Ahl El Beit, appartiennent au Hezbollah et ils sont sans doute plus au coeur du r�seau clandestin que les membres marocains et tunisiens arr�t�s.

Pourtant la presse, � l'�poque de leur arrestation comme lors du proc�s, les laissera dans l'ombre car les charges retenues contre eux sont tr�s l�g�res et qu'ils apparaissent � beaucoup comme de simples comparses. En effet, la presse insiste sur la nationalit� maghr�bine de certains membres du r�seau pour dresser un tableau pour le moins ambigu des rapports entre terrorisme et immigration.

Elle fantasme sur les communaut�s relais implant�es en France par les �tats �trangers et un certain nombre de "sp�cialistes" du terrorisme lui embo�tent le pas ou la pr�c�dent [19]. On cherche � persuader l'opinion que le r�seau Fouad Saleh vit comme un poisson dans l'eau au sein des immigr�s et que c'est l� qu'il recrute. Les manchettes de journaux sur l'int�grisme se multiplient�

Pourtant, l� aussi une lecture attentive des documents montre � quel point il fut difficile � Fouad Saleh de recruter et comment les agents op�rationnels durent venir du Liban. En exag�rant, on pourrait presque dire que la compr�hension v�ritable du r�seau Fouad Saleh passe par l'id�e qu'il fut justement impossible de recruter dans l'immigration fran�aise car celle-ci n'adh�rait en rien, m�me chez les plus radicaux, au projet d'une "sale guerre" contre les Fran�ais [20].

Fouad Saleh n'a pu convaincre que quelques proches et encore en leur cachant en grande partie la v�rit�. Le Hezbollah a d� faire appel � des membres de son organisation � Paris et � des membres venus du Liban pour commettre les attentats.

Il y a alt�rit� des r�seaux soci�taux, transfert quasi-complet d'hommes et de mat�riels sans r�elle infrastructure sur place, ce qui explique en grande partie les faiblesses du r�seau. Celui-ci n'arrive pas � s'internaliser, � mordre sur l'immigration en France.

Les indices concernant la participation d'auteurs libanais

D'apr�s ce que l'on peut savoir, l'�quipe maghr�bine de Fouad Saleh n'avait donc qu'un r�le de soutien logistique, elle n'a ni d�pos� les explosifs, ce qui serait le fait de plusieurs Libanais venus puis repartis imm�diatement dans tous les cas, ni �crit les revendications du CSPPA ou du PDL, ce qui serait le fait d'une troisi�me �quipe rest�e � Beyrouth et d'un seul scripteur � Paris qu'aucune investigation ne permettra de trouver [21].

Tout ce que l'on sait du groupe libanais se r�duit � peu de renseignements tir�s des confessions des "repentis" : six noms (Nizar El Zein, Ibrahim Akil dit Tashin ou Ali Ghosn, Mohamed Mehdi Diab dit Abou Amer, Ali Hassan, Hussein Mazbou et Ha�dar Habib dit Bassam ou Nasredin ou Nasser Eddine) et un num�ro de t�l�phone au Liban renvoyant � un quartier contr�l� par le Hezbollah, o� les otages fran�ais pass�rent une partie de leur d�tention [22].

Informations v�rifi�es par la police de l'air et des fronti�res qui, effectivement, retrouva ces noms dans des vols pr�c�dant de peu les principales s�ries d'attentats. De plus, on sait par Badaoui qu'Habib Ha�dar, l'artificier du groupe libanais, vint chez lui chercher des explosifs au moins � deux reprises en mars, puis en septembre, apr�s que, le 15 juin, Fouad Saleh ait ramen� un nouveau chargement.

Seulement, de nombreux points obscurs subsistent : quels �taient les liens entre les deux �quipes, la libanaise op�rationnelle et l'�quipe logistique Fouad Saleh ?

� part Fouad Saleh, y avait-il d'autres contacts en France pour les poseurs de bombe ? Quels �taient les liens entre l'�quipe Fouad Saleh et l'�quipe Hamade ? Comment ont transit� les explosifs, les armes, l'argent et les hommes n�cessaires � la commission des attentats ? Les poseurs de bombes �taient-ils des mercenaires pay�s ou des individus id�ologiquement motiv�s et appartenant au Hezbollah ? De qui recevaient-ils leurs ordres et quelle marge de man�uvre avaient-ils ?

Ont-ils choisi eux-m�mes les cibles, ou leur a-t-on dit o� frapper ? Plus "professionnelle", l'�quipe libanaise, si tant est qu'elle ne se r�duit pas � un homme, semble avoir fait attention � ne pas �tre trop en contact avec d'autres personnes que Fouad Saleh, m�me si certains durent rencontrer Badaoui et Agnaou pour r�cup�rer les explosifs cach�s chez eux.

On peut d'une certaine mani�re distinguer deux p�riodes : les attentats de d�cembre 85 et f�vrier 86 dont le ma�tre d'oeuvre serait Hussein Mazbou et apr�s l'expulsion de celui-ci, les attentats de mars et septembre 86 dont l'artificier serait Habib Ha�dar dit Bassam. Hussein Mazbou, haut responsable du Hezbollah et un des chefs de leur service secret seraient venus � Paris en mai 1985 o� il aurait remis une valise d'explosifs � Fouad Saleh qui l'aurait d�pos�e chez Badaoui.

Au mois d'octobre Ibrahim Akil, alias Ali Ghosn rejoignait Mazbou � Paris en compagnie d'Hassan Ghosn. Il est vraisemblable que les attentats de d�cembre 85 furent r�alis�s par cette �quipe, en liaison avec quelques-uns des Libanais cit�s plus haut et peut-�tre Ali Fouad Saleh.

L'absence de cr�dibilit� des premi�res revendications laisse penser � une phase de "test" avant de se lancer dans la campagne de f�vrier. Hussein Mazbou devait en effet revenir fin janvier � Paris pour programmer l'ensemble des attentats et en faire une "campagne" programm�e sur plusieurs mois, mais le r�seau �tait d�sorganis� par l'expulsion de Mazbou en f�vrier. On envoyait alors � la place de Mazbou, Habib Ha�dar, membre plus obscur du Hezbollah, parlant mal le fran�ais�, pour prendre la place de responsable des op�rations et d'artificier du r�seau.

Le r�le d'Ali Fouad Saleh fut alors sans doute plus important car il devait assumer une partie des t�ches qui auparavant incombait � Mazbou. C'est � cette �poque semble-t-il qu'on lui donna le num�ro de t�l�phone du quartier g�n�ral du Hezbollah. Fouad Saleh accompagna Habib Ha�dar chez Badaoui, le pr�sentant sous le nom de Bassam et demanda � Badaoui de le laisser utiliser la valise.

A�dar repartira de Paris apr�s le 20 mars, et les attentats cesseront. Pourquoi cet arr�t ? S'agit-il de laisser le temps au nouveau pouvoir fran�ais de n�gocier apr�s lui avoir rappel� qu'il serait aussi la cible d'attentats ? Peut-�tre, m�me si l'on peut �tre surpris que le Hezbollah brouille en m�me temps les pistes. Une rationalit� moins strat�gique et plus prosa�que tient peut-�tre � l'absence de plan programm� plus avant et � la n�cessit� d'en r�f�rer � Beyrouth.

Comme en juillet et ao�t, Badaoui et Agnaou s'en vont en vacances, les op�rations sont repouss�es � la rentr�e [23]. Ha�dar revient donc simplement au mois de septembre pour la nouvelle s�rie d'attentats. Hormis Ha�dar, combien �taient les Libanais venus du Liban ? �taient-ils en contact avec les Libanais de Paris ou simplement avec Fouad Saleh ?

Il est difficile de juger. Il semble en tout cas que chaque poseur de bombe ait �t� un (ou plusieurs) membre libanais actif du Hezbollah, agissant sur le territoire fran�ais et en repartant imm�diatement, laissant le soin � Fouad Saleh de faire les rep�rages. La connexion avec le Hezbollah est donc quasiment certaine.

C'est cette organisation qui a programm� les attentats en France en s'appuyant sur un r�seau volant tr�s limit� (une ou deux personnes) et sur un r�seau sur place lui aussi tr�s r�duit et dont l'all�geance tient � la seule personne de Fouad Saleh.

Les r�seaux transfronti�res mis au point par le Hezbollah : manque de moyens, amateurisme� mais efficacit� malgr� tout

Il est d�licat de se prononcer avec certitude sur les liens avec la direction officielle du Hezbollah libanais faute de preuve judiciaire mais les �l�ments r�unis lors des proc�s fran�ais et allemand sont importants. Hussein Mazbou, Ibrahim Akil, Mohamed Mehdi, Hassan Ghosn, Abdelahdi Hamade [24] sont autant de responsables importants du Hezbollah.

Ils entourent Igmad Moughnieh et cheikh Fadlallah. Ils sont � la t�te de familles lourdement impliqu�es dans les prises d'otages occidentaux � Beyrouth et dans les d�tournements d'avions qui y sont li�s. Aussi peut-on penser que les hommes entra�n�s � commettre des attentats, la planification de ceux-ci, l'origine des explosifs et des armes proviennent de la direction du Hezbollah.

Les poseurs de bombes, appartenant � des familles chiites connues pour leur appartenance au Hezbollah ou en �tant tr�s proches, sont venus � Paris avec des passeports libanais en bonne et due forme si l'on excepte le changement de photographie, et cela ne fait que mettre en lumi�re la faiblesse � l'�poque des services de renseignements ext�rieurs fran�ais.

Ils sont pass�s � travers les contr�les de fronti�res � plusieurs reprises sans v�ritablement �tre inqui�t�s si ce n'est Abas Hamade [25] en 1987. Les explosifs, quant � eux, ont suivi diff�rentes fili�res selon les moments mais les grandes lignes sont identiques.

On ne conna�t pas la mani�re dont ils sont pass�s en 1985 et comment la valise d'une trentaine de kilos de C4 a �t� convoy�e. En revanche, on est particuli�rement bien renseign� sur les transits d'explosifs qui eurent lieu fin 1986 et d�but 1987 et qui contribu�rent � faire chuter le r�seau. Tout d'abord il faut rappeler que les d�clarations de Badaoui lors du proc�s ont permis de comprendre pourquoi les attentats s'�taient arr�t�s apr�s la rue de Renne en septembre 1986.

On s'�tait beaucoup interrog� en supputant des accords secrets entre le gouvernement fran�ais et les poseurs de bombes�, la raison plus prosa�que fut que le r�seau n'avait plus d'explosifs et que Fouad Saleh et Ha�dar Habib furent oblig�s de partir � Beyrouth pour rendre compte de leurs actions et pour en recommander. Les nouveaux stocks d'explosifs qui arriveront � partir d'octobre 1986 ne sont plus compos�s de C4 mais, d'une part de pentrite et d'autre part de nitrate de m�thyl.

L'importation de l'explosif solide (la pentrite) se fera par le biais de rouleaux d'imprimerie dans lesquels on masquera l'explosif. Le 30 septembre 1986, un premier colis d'une soixantaine de kilos part de Beyrouth exp�di� par la soci�t� AKS (Abdul Karim, Hussein Jaafar) via le transitaire C/Itoh dirig� par Tony Daoud. Il est envoy� en France � une soci�t� franco-libanaise : la CSC dirig�e par Sadek Kronfol.

Ce dernier, dont la soci�t� est en liquidation judiciaire fait affaire habituellement avec l'entreprise Nassar dont le gendre est Toni Daoud. Choisi en fonction de liens personnels des membres du r�seau plus qu'en raison d'une couverture officielle solide (la soci�t� est en liquidation judiciaire), Kronfol fait r�cup�rer � Orly fret le 22 octobre les deux colis du premier arrivage et les entrepose dans sa soci�t�, avenue des Champs-�lys�es.

Il les stocke en attendant qu'Habib Ha�dar vienne les chercher sous le nom d'Abbas Nasredine le 25 novembre. Un deuxi�me colis partira de Beyrouth le 9 novembre en suivant le m�me trajet mais la lettre de transport a�rien n'arrive pas � Kronfol et le colis est stock� dans les entrep�ts de la Chambre de commerce � Orly le 21 novembre. Kronfol t�l�phone � la soci�t� France Handling afin qu'ils r�cup�rent le colis le 8 d�cembre et qu'ils le gardent en attendant que la soci�t� DEFIE leur d�douane.

Cette soci�t� le fait le 18 d�cembre. Ha�dar essaie le 18 d'aller chercher les colis mais n'ayant pas de lettre de transport a�rien, il s'en voit refuser l'acc�s. Il t�l�phone � Kronfol qui lui en remet une et le 19 d�cembre le deuxi�me colis est r�cup�r� par Ha�dar et Aroua, ce dernier devant mettre de sa poche pour payer la facture car Ha�dar n'a pas pris assez d'argent sur lui. Les explosifs sont alors convoy�s jusque chez Bourguiba. L� les colis sont d�coup�s et l'explosif est r�parti dans des sacs afin d'�tre enterr�s dans des poubelles qui ont �t� pr�alablement enfouies en for�t de Fontainebleau au d�but du mois.

Ces poubelles seront retrouv�es par la police scientifique de la DST apr�s les indications de Badaoui et Aroua. Le 26 mai 1987, une premi�re poubelle scell�e avec du goudron et contenant 8,79 kg d'explosif et 6,5 kg d'h�ro�ne, m�lang�s � de la caf�ine sera retrouv�e par les �quipes de police. Une seconde, vide, le sera le 29 d�cembre. Elle contenait, apr�s examen, des traces de tolite, l'explosif utilis� contre le bureau de poste de l'H�tel de ville et le pub Renault.

L'importation du nitrate de m�thyle se fera via l'Allemagne par l'�quipe Hamade. Les deux fr�res Hamade se chargeaient du conditionnement du nitrate de m�thyle dans des bouteilles d'Arak et les acheminaient du Liban en Allemagne, en Sarre, � la fronti�re fran�aise, via l'a�roport de Larnaca. L� elles �taient convoy�es semble-t-il par deux hommes, Youssef Mechref et Mohamed Mehdi Diab, vers la France et remises � Fouad Saleh [26].

Il est impossible de ne pas s'interroger sur le c�t� artisanal des transferts d'explosifs. Nous sommes tr�s loin de l'organisation de groupes comme le FPLP ou Abou Nidal. Nous le sommes encore plus d'un groupe soutenu par un �tat et qui pourrait user de la valise diplomatique pour convoyer les explosifs.

Il r�sulte de cette description une impression d'amateurisme, de "trafic" qui renvoie beaucoup plus aux techniques habituelles des r�seaux transnationaux de la diaspora libanaise qu'� des pratiques �tatiques [27].

Mais cet amateurisme a ses avantages, il se perd dans la foule des "petites combines" habituelles au milieu et n'�veille pas l'attention des services de police qui, en revanche doivent surveiller de pr�s les all�es et venues des "diplomates" du Moyen-Orient.

Bref on voit � quel point les pratiques mercantiles habituelles du Liban, fortement li�es au client�lisme, � l'interconnaissance, � l'absence de r�gles juridiques, au paiement en liquide, aux "arrangements", moulent les comportements des membres du r�seau libanais.

Ainsi, les logiques transnationales d'acteurs sub�tatiques (libres de souverainet�) n'en sont pas moins plus difficiles � d�tecter pour des �tats que les techniques habituelles d'infiltration de services secrets adverses. Ces �l�ments mat�riels remettent en cause l'id�e d'un soutien actif des Iraniens aux attentats de 86.

On peut m�me penser que c'est la croyance en ce soutien qui explique les erreurs d'analyse (donc de surveillance) qui ont �t� faites � l'�poque et qui se prolongent actuellement dans les milieux policiers et judiciaires. Croyant � une "affaire d'�tats", ils ne peuvent en effet raisonner que dans le cadre de l'inter�tatique, des relations internationales classiques et ne sont pas � m�me de penser l'interp�n�tration des sph�res transnationales et �tatiques, caract�ristique de notre �poque.

Cela les am�ne sans doute � sur�valuer le r�le des Iraniens en voyant en eux un gouvernement homog�ne, rationnel, chef d'orchestre clandestin d'une strat�gie indirecte, bref en lisant les actions des organisations, des communaut�s et des factions moyen-orientales par le prisme d�formant de la th�se de l'internationale terroriste2 [28

Les indices concernant la participation directe des Iraniens dans les attentats

Avec la d�couverte du r�seau Fouad Saleh/Hamade, remontant jusqu'au Hezbollah libanais, la piste d'une participation iranienne directe aux attentats fut relanc�e. Le gouvernement comme les m�dias furent persuad�s que l'Iran parrainait les op�rations Fouad Saleh Hamade par l'interm�diaire du Hezbollah et m�me qu'il avait un agent sur place donnant les ordres d'op�rations au groupe Fouad Saleh, cet agent s'appelant Vahid Gordji.

Ce que l'on a appel� l'"affaire Gordji" doit �tre resitu�e dans ce cadre pour comprendre comment, de d�rapages en d�rapages, la France et l'Iran ont abouti � la rupture des relations diplomatiques [29]. Au d�part, le juge Boulouque s'interroge sur les liens qui unissent Ali Fouad Saleh et Mohamed Mouhajer.

Ce dernier, qui a h�berg� chez lui Fouad Saleh de novembre 1985 � janvier 1986, est-il li� aux attentats ? A priori, Mouhajer ne fait que de la propagande religieuse, mais il a �t�, lui aussi, � Qom, il a aid� � plusieurs reprises Fouad Saleh et est tr�s li� au Hezbollah dont son fr�re est un des tr�soriers.

La DST commence donc � enqu�ter plus s�rieusement sur Mouhajer, et d�couvre qu'il est en liaison constante avec un attach� d'ambassade, Vahid Gordji, officiellement simple traducteur, mais officieusement num�ro deux de l'ambassade d'Iran, charg� par l'Iran de n�gocier avec les diplomates fran�ais dans l'affaire des otages. De plus, on d�couvre que Mouhajer est parti en RFA pour acheter une BMW gris fonc� au nom de Vahid Gordji d�but septembre 1986.

Or, certains t�moins de l'attentat de la rue de Rennes, dont Mme Besse, affirment avoir vu une BMW noire suspecte d�marrer en trombe apr�s l'attentat. Circonstance aggravante, l'enqu�te r�v�le que Vahid Gordji a fait repeindre sa BMW en couleur claire fin septembre 1986 par Mohamed Moussaoui (petit neveu de Hussein Moussaoui, un des principaux responsables iraniens) qui s'est enfui peu apr�s de France et, sous une fausse identit�, a r�clam� l'asile politique � la Suisse.

C'en est assez pour que le juge Boulouque d�cide d'entendre Vahid Gordji comme t�moin et demande son interpellation. Seulement, cette interpellation g�ne consid�rablement les n�gociations sur les otages et, selon Charles Villeneuve, des repr�sentants du minist�re de l'Int�rieur font savoir au juge qu'il serait mals�ant de l'interroger.

Lorsque, le 2 juin 1987, les enqu�teurs envoy�s par le juge arrivent au domicile de Vahid Gordji, celui-ci n'y est plus. On saura plus tard qu'il s'est r�fugi� � l'int�rieur de l'ambassade pour y b�n�ficier de l'extra-territorialit�.

Mais pour l'instant, on ne sait o� il a disparu et l'on constate seulement un vent de panique � l'ambassade d'Iran o� plusieurs personnes qui, comme Vahid Gordji, ne sont pas des diplomates professionnels, et donc ne disposent pas de l'immunit� diplomatique, s'enfuient pour gagner la Suisse.

Les services fran�ais, interloqu�s par cette effervescence, supposent qu'ils ont effectivement trouv� les coupables iraniens et que ces derniers pr�tent aux enqu�teurs plus d'indices qu'ils n'en ont r�ellement. Charles Pasqua et Robert Pandraud, alert�s, exigent que les Iraniens en fuite soient interpell�s et raccompagn�s jusqu'� leur ambassade en attendant plus ample information.

L'ambassade est alors mise sous surveillance discr�te, puis de mani�re publique et m�diatique le 28 juin pour faire monter la pression. Le 2 juillet, furieux de cette mise en sc�ne et de cette surveillance, les Iraniens font une conf�rence de presse o�, coup de th��tre, Vahid Gordji r�appara�t en tenant son r�le habituel de traducteur et parlant de lui � la troisi�me personne.

Au cours de cette conf�rence de presse le responsable de l'ambassade, M. Hadadi, affirme que le diplomate Didier Destremeau a pr�venu Vahid Gordji, ce qui lui a permis de regagner l'ambassade avant l'interpellation. Toute la presse s'empare alors de l'affaire et la traite sous deux angles : l'implication iranienne dans les attentats et les rivalit�s de services ou de minist�res qui ont abouti � laisser partir Gordji.

La situation devient alors inextricable. Le juge Boulouque, qui se suicidera ensuite, exige que l'on renforce la surveillance de l'ambassade pour que Vahid Gordji ne puisse s'�chapper. Le gouvernement [30], maintenant que les m�dias sont au courant, ne peut qu'abonder dans son sens, et d�savouer officieusement Didier Destremeau qui nie �nergiquement avoir pr�venu Gordji mais sans �tre cru [31].

Les Iraniens, qui ont voulu jouer des m�dias contre le gouvernement fran�ais en cr�ant la zizanie, sont pris au pi�ge de l'escalade. Comme le gouvernement fran�ais ne rel�che pas le si�ge de l'ambassade, et remet en cause la normalisation des relations qui passe par une limitation des ventes d'armes � l'Irak le 7 juillet, les Iraniens prennent en otage des diplomates fran�ais � T�h�ran, et accusent, le 14 juillet, notre Premier secr�taire d'ambassade, M. Torry, d'espionnage, afin de proc�der � un marchandage devant aboutir � la lib�ration de Gordji.

Seulement, le gouvernement fran�ais, loin de l'accepter, refuse l'�change entre M. Torry et Vahid Gordji, car ce serait reconna�tre la l�gitimit� des prises d'otages de Fran�ais au Liban pour obtenir la lib�ration d'individus jug�s coupables par les tribunaux fran�ais [32].

La strat�gie d'escalade continue donc avec l'envoi de la flotte fran�aise dans le Golfe et des attaques iraniennes contre un navire fran�ais, le "Ville d'Anvers", puis elle atteint son point culminant avec la rupture des relations diplomatiques, le 17 juillet.

Seulement, durant ce temps, l'enqu�te judiciaire s'est poursuivie et les charges retenues contre Mouhajer et Gordji s'effondrent une � une. Tout d'abord Gordji, qui avait �t� soup�onn� d'�tre le scripteur des textes de revendication du CSPPA, se voit innocent� par les graphologues. Ensuite, la BMW achet�e en RFA ne semble pas �tre du m�me mod�le que celle d�crite par les t�moins de la rue de Rennes.

Le dossier judiciaire est alors quasiment vide. M�me si de tr�s nombreux points obscurs subsistent, il est impossible d'inculper Gordji. En revanche, il est n�cessaire de l'entendre comme t�moin.

Le juge Boulouque, ayant refus� auparavant de l'entendre en se d�pla�ant dans les locaux de l'ambassade d'Iran ou du Pakistan, la seule solution possible est d'attendre sa sortie, de l'entendre puis de le relaxer, ce qui sera fait lors du d�nouement de l'affaire avec les remous que l'on conna�t, le juge Boulouque passant pour avoir pli� devant le pouvoir politique alors qu'il avait des preuves dans son dossier [33], bien qu'en r�alit� il n'e�t rien de concret sur le plan judiciaire.

Si le juge n'a pas grand-chose � se reprocher, il reste une question d�licate. � partir de quand le gouvernement fut-il au courant que Gordji �tait hors de cause judiciairement ? Et pourquoi dans ces conditions a-t-il continu� la strat�gie de l'escalade au lieu de celle de la n�gociation qu'attendaient les Iraniens ?

Il semble que Charles Pasqua, voyant l'affolement des Iraniens, ait suppos� que Vahid Gordji �tait plus important qu'il n'y paraissait, et qu'il avait peut-�tre d'autres choses � se reprocher en dehors des attentats [34], par exemple l'�limination de moudjahidin du peuple de Radjavi l'opposant au r�gime de Khomeiny.

Il d�cida alors, m�me apr�s le 10 ao�t, date � laquelle le juge Boulouque lui a fait part du dossier, de laisser les Iraniens dans l'incertitude en leur faisant croire que les charges contre Gordji �taient irr�futables, afin de s'en servir comme monnaie d'�change contre nos otages d�tenus au Liban : Gordji, sinon innocent du moins non coupable aux yeux de la justice contre nos otages.

Le march� �tait, somme toute, moins d�s�quilibr� que celui r�clamant la lib�ration de Naccache, v�ritable criminel condamn� par la justice. Les Iraniens, inquiets pour le sort de Gordji et pr�ts � penser que le gouvernement fran�ais irait jusqu'� fabriquer de fausses preuves pour le condamner et impliquer l'Iran, fit alors pression sur le Hezbollah pour qu'il lib�re au moins deux otages : Auque et Normandin.

Ces derniers �taient lib�r�s le 28 novembre. Le lendemain, Vahid Gordji �tait entendu par le juge Boulouque pendant deux heures, et prenait directement l'avion pour T�h�ran. Les m�dias, persuad�s de la culpabilit� de Gordji, ne savaient s'il fallait louer ou bl�mer Charles Pasqua de la lib�ration de deux otages dans de telles conditions.

Ils se retournaient donc contre les juges, affirmant que l'affaire Gordji gommait la fermet� de la condamnation d'Abdallah [35]. Finalement, il r�sulte de ces �v�nements qu'il est impossible judiciairement de prouver l'implication directe de l'Iran dans les attentats bien que certains indices puissent conduire logiquement � eux.

En effet, si les Iraniens n'ont pas directement commandit� de Paris les attentats par l'interm�diaire de Gordji, il n'est pas impossible que certains d'entre eux (Rafigh Doust) en soient les commanditaires indirects, en dehors de tout rapport avec Khomeiny, par Hezbollah interpos�, et � titre d'initiative personnelle. Simplement il est quasiment certain qu'ils n'ont pas fourni d'aide mat�rielle et que toute l'infrastructure logistique est venue du Hezbollah lui-m�me, ce qui explique les faiblesses et l'originalit� des modalit�s de transfert choisies.

De plus l'accumulation mat�rielle de preuves laiss�es en �vidence dans les divers domiciles t�moigne d'un amateurisme total. Cet amateurisme tranche lui aussi avec l'image d'un groupe de professionnels bien organis�, relais d'une puissance �trang�re agissant sur le territoire fran�ais.

Il met � mal les visions g�ostrat�giques globales qui raisonnent sur le terrorisme comme pour les actions de services secrets et n'arrivent pas � penser le terrorisme comme logique de violence politique transnationale incluant des acteurs de niveaux hi�rarchiques diff�rents, caract�ris�s par leur asym�trie mais fortement impliqu�s dans leur totalit� dans le jeu politique.

C'est ce vecteur de transnationalit� qui est sans doute le plus original et le plus nouveau dans la relation terroriste incluant des acteurs ext�rieurs qui parrainent une organisation �cran. � ce titre, il nous faut maintenant essayer de tirer les le�ons des attentats de 1986 et reconstruire intellectuellement la configuration des positions des acteurs au sein de la relation terroriste en analysant leurs motivations et leurs coups tactiques [36

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1] Certains de nos coll�gues succombent malgr� tout � la tentation de la notori�t� facile, l�gitimant ainsi le soup�on des autres. Pour plus de d�tails sur les conditions de production du savoir universitaire � propos du terrorisme, voir notre article "Terrorisme et antiterrorisme en France", Cahiers de la S�curit� Int�rieure (1), avril-juin 1990.


2] Pour une approche th�orique du terrorisme analysant sa sp�cificit� � l'�gard d'autres formes de violence, les m�canismes qui structurent les comportements des acteurs, les strat�gies de ces derniers et l'obligation d'avoir une analyse relationnelle insistant sur l'�change des coups tactiques� voir Didier Bigo, Daniel Hermant, La relation terroriste, �tudes Pol�mologiques (47), 1988, 192 pages


3] Nous avons pu obtenir dans le cadre d'un contrat de recherche avec le minist�re de la Recherche et l'Institut des hautes �tudes de s�curit� int�rieure les deux r�quisitoires du proc�s correctionnel du 9 mars 1990 et du proc�s criminel qui devrait se tenir l'ann�e prochaine. Nous avons aussi depuis 1986 rencontr� de nombreux responsables : Les juges Boulouque, Fourvel et Marsaud, les responsables de l'Unit� de coordination et de liaison antiterroriste (UCLAT) MM. Querry et Tchividjian, des responsables du Quai d'Orsay, certains des interm�diaires choisis par les hommes politiques pour les n�gociations � propos des otages et des attentats de 86, � quoi il faut ajouter les livres t�moignages de certains d'entre eux comme celui de Daniel Burdan, Neuf ans � la division antiterroriste, Paris : Laffont, 1990, ou les r�cits des otages�


4] Commis par Habib Mohamar qui se r�clamera de l'organisation Abou Ibrahim, groupe du 15 mai, non revendiqu� � l'�poque


5] Certains enqu�teurs font remonter la s�rie � l'attentat du 9 mars dont s'occupe le juge Rivi�re, ce qui rendrait les attentats contemporains des prises d'otages au Liban.


6] Le foyer install� dans le 13�me arrondissement de Paris sera ferm� en 1984, r�ouvert au Kremlin Bic�tre, dans la banlieue parisienne et d�finitivement interdit par Gilles Boulouque en 1987.


7] Ce qui est possible, mais n'emp�che pas l'irritation des auteurs parisiens des attentats et la relance imm�diate de ceux-ci au lendemain de l'interpellation et de la relaxe de certains d'entre eux ; relaxe qui renforce leur sentiment d'�tre prot�g�s, d'avoir la baraka, bref d'�tre quasi-invuln�rables, Cela pose la question cruciale des liens exacts entre les auteurs des prises d'otages et les attentats parisiens.


8] Il s'agit ici de la vision des Abdallah car faut-il le rappeler en ces temps de marchandage g�n�ralis� sous l'�gide de l'ONU et en contradiction avec les d�clarations des gouvernements depuis pr�s de dix ans, rien ne justifie d'�changer un otage contre un responsable d'attentats.


9] Certains �l�ments troublants expliquent cet ent�tement sur la piste Abdallah. Tout d'abord il est demand� sa lib�ration sous son nom d'Abdel Kader Essaadi, Nabil Dagher appartenait au FARL, Jean-Paul Mazurier, avocat d'Abdallah renseignant la DST, affirme avoir vu chez son client une lettre du CSPPA, des t�moins reconnaissent la photo d'Emile Abdallah (en fait Habib Ha�dar qui lui ressemble fortement pour un oeil non exerc�). Enfin et surtout, les services syriens et alg�riens correspondants de la DST persuadent celle-ci que les Abdallah sont bien les coupables et se posent en m�diateurs pour en tirer Profit


10] D'autant que, simultan�ment, les services fran�ais d�membraient discr�tement une fili�re d'explosifs qui passait par la C�te d'Ivoire : sur ce sujet voir Didier Bigo, "l'�migration libanaise en C�te d'Ivoire : la stigmatisation d'une diaspora", Cahiers de l'Orient, janvier 1992.


11] Sur les fausses pistes, voir Didier Bigo, Daniel Hermant, "Tiers, m�diateurs et parasites", �tudes Pol�mologiques (49)


12] D'apr�s certains entretiens, on peut supposer que le plan iranien en question �tait plus global. Il visait avant tout � r�cup�rer, voire � racheter, les otages fran�ais au Liban afin de faire monter la pression dans les n�gociations en �tant s�r de pouvoir les lib�rer par la suite en fonction des besoins. Il faisait l'analyse de l'aide fran�aise � l'Irak et tout en citant les attentats, n'indiquait pas explicitement que l'Iran les avait commandit�s au Hezbollah ou m�me qu'il aurait fourni une aide financi�re ou logistique sur place, mais prend-on le risque d'�crire de telles choses ?


13] Mouhajer sera rel�ch�.


14] Le groupe Hamade se compose de Mohamed Ali, de son fr�re Abbas,..


[15] Bundeskriminalamt dont un service coordonne la lutte anti-terroriste au niveau f�d�ral


16] Il aurait parl� de prendre les armes avec les Kurdes contre les hypocrites du r�gime iranien accusant les mollahs de "prox�n�tisme � la suite des "remariages" des veuves de guerre.


17] Le 20 mars 1985, Fouad Saleh, sans argent, est expuls� de son logement et demande � Badaoui de l'h�berger


18] Il ne s'agit pas non plus d'un mercenariat. Ali Fouad Saleh n'a pas de domicile fixe, pas d'argent� ses compagnons non plus. Au total, ils auraient touch� moins de vingt mille francs de Beyrouth � eux tous pour faire face � leurs d�penses. Nous sommes loin des h�tels de luxe dans lesquels se complaisait parait-il Carlos ! Quant aux stup�fiants que l'on retrouve, ils n'en consomment pas, d�s lors ils avaient peut-�tre le d�sir de les vendre mais n'ont pas eu le temps de le faire. Ils servaient sans doute d'interm�diaire pour le trafic de drogue des familles Hamade et Gosn.


19] Dans �tudes Pol�mologiques, nous avions mis en garde contre les dangers d'amalgame, mais, d'une certaine mani�re, nous �tions rest�s trop pr�t de ces th�ses en reprenant l'id�e douteuse de "communaut� relais"


20] Voir R�my Leveau, "le non-passage au terrorisme de l'immigration maghr�bine", �tudes Pol�mologiques (49)


21] La DST soup�onnera un membre du FPLP/CG d'�tre le fameux scripteur des revendications du CPPA apr�s avoir abandonn� la piste Abdallah


22] Num�ro que l'on retrouva aussi dans le carnet d'Hamade.


23] � titre d'hypoth�se, on peut penser qu'au mois de mars les explosifs ne sont plus suffisants pour lancer une nouvelle campagne, ce qui expliquerait le voyage de Saleh en juin et la programmation pour septembre des attentats, sans n�gliger la possibilit� d'une certaine malignit� qui pousse � faire croire � la piste Abdallah


24] Fr�re a�n� de Mohamed et Abbas Hamade.


25] Voir plus haut, l'arrestation par les Allemands des fr�res Hamade.


26] Pour une analyse des relations entre les groupes Hamade et Fouad Saleh ainsi que pour l'analyse du traitement judiciaire diff�renci� entre les deux pays, voir Sylvie Lemasson et Didier Bigo : article � para�tre.


27] Une soci�t� en liquidation judiciaire choisie pour des raisons de liens familiaux, le stockage dans des soci�t�s tierces par perte de la LTA, l'absence d'argent qui �veillera les soup�ons des personnes de la soci�t� Defie et aidera � l'identification� plus bien s�r tous les rat�s techniques des attentats, et un chef de r�seau � la rue et dans divers logements de fortune.


28] Voir l'article de Michel Wieviorka dans ce m�me num�ro. Comme il le dit justement cette th�se, m�me "revisit�e" apr�s les d�clarations des responsables des services de l'Est, reste inop�rante pour expliquer le terrorisme en grande partie parce qu'elle le con�oit dans le cadre d'une strat�gie indirecte de guerre froide et ne tient pas compte de l'autonomie des acteurs libres de souverainet�. De plus les d�clarations r�centes au journal Spiegel sur la collaboration de la Stasi et de la RAF outre qu'elles portent sur une p�riode o� le sigle RAF a �t� utilis� par des groupuscules de quelques personnes isol�es de la direction (pour �chapper aux investigations et recoupements informatiques du BKA), restent sujettes � caution. Faites dans le but de r�cup�rer Honnecker, r�fugi� en URSS, elles servaient un projet politique pr�cis et permettaient en m�me temps aux "responsables des servires secrets" des pays de l'Est de vendre souvent tr�s cher leurs soi-disant r�v�lations. Quand a lieu la "d�sinformation" : avant ou maintenant ? la RFA n'�tait-elle pas d'accord avec la porte de sortie du terrorisme ouverte � des membres de la RAF qui "prenaient leur retraite" (et ne continuaient pas la lutte arm�e depuis un sanctuaire) en RDA. L'exemple italien nous apprend que les services occidentaux savent aussi manier la d�sinformation et il est encore hasardeux de tirer des conclusions de ces "r�v�lations".


29] Ce qui, pour la France, ne s'est produit que dans des cas rarissimes, tous li�s � des situations de conflit mondial.


30] Qui depuis le 18 juin ou m�me le 2 savait que Gordji �tait � l'ambassade et avait commenc� des tractations.


31] Didier Destremeau a-t-il agi de sa propre initiative ? C'est peu probable. Alors � quel niveau de responsabilit� se situe-t-elle ? Son chef de service, son ministre, le gouvernement ? Autant d'hypoth�ses ouvertes m�me si celle du ministre est la plus cr�dible.


32] De plus Torry, pr�venu des risques, a pris ses pr�cautions et a d'amples provisions dans l'ambassade, ce qui n'est pas le cas des Iraniens � Paris dont on a coup� l'eau, l'�lectricit�


33] Voir la caricature de Plantu dans le journal Le Monde o� Gilles Boulouque se transforme en stewart et propose � Gordji : "fumeur" ou "non fumeur".


34] Ce qui expliquerait la panique de l'ambassade


35] Double erreur d'une presse le plus souvent mal renseign�e.


36] Compte tenu de la place limit�e, nous nous concentrerons sur les organisations �crans et leurs parrains mais une analyse compl�te n�cessite de prendre en compte l'attitude des pouvoirs publics fran�ais, leurs strat�gies, leurs contradictions, les coups qu'ils jouent dans l'ar�ne politique compliqu�e par la cohabitation et les positions des "Tiers", des victimes, de la population fran�aise, de la communaut� immigr�e� Sur tous ces point, voir �tudes Pol�mologiques (49) dont la seconde partie de notre article s'inspire.
(source Didier Bigo, Cultures & Conflits)

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