COLONNA : UNE ARRESTATION PREPAREE?
Jul 5, 2003
Auteur: L'investigateur

Yvan Colonna, soup�onn� d'avoir assassin� le pr�fet Erignac, a �t� interpell� vendredi en Corse-du-Sud, non loin de Porto Pollo, � quelques kilom�tres du fief de son avocat Antoine Sollacaro. Apr�s avoir �t� traqu� durant plus de quatre ans, Yvan Colonna a �t� transf�r� "dans la nuit" de vendredi � samedi d'Ajaccio vers Paris pour �tre pr�sent� � un juge antiterroriste.

Son interpellation est intervenue alors que se d�roule actuellement et depuis le 2 juin devant la cour d'assises sp�ciale de Paris le proc�s de huit des assassins pr�sum�s du pr�fet. Elle survient �galement � 36 heures du r�f�rendum sur la r�forme du statut de la Corse, organis� dimanche dans l'�le.

"Oui, c'est moi." C'est par ces mots qu'Yvan Colonna a accueilli vendredi vers 19h00 les hommes du Raid venu le cueillir dans une bergerie du maquis de la Corse-du-Sud. Il n'�tait pas arm�. Il avait les cheveux longs et avait singuli�rement grossi.

C'est "une grande nouvelle pour notre pays", s'est r�joui le ministre de l'Int�rieur Nicolas Sarkozy, f�licit� par Jacques Chirac, selon qui "cette arrestation permettra � la justice d'�tablir enfin la v�rit� sur l'assassinat du pr�fet Erignac".

Le ministre de l�int�rieur vient ainsi de gagner un ticket gagnant pour un poste d�terminant dans le gouvernement.

La veuve du pr�fet, Dominique Erignac, pr�venue par M. Sarkozy lors de son retour du palais de justice de Paris, s'est dite "�mue par (cette) nouvelle extraordinaire" bien qu�Yvan Colonna reste pr�sum� innocent de l�assassinat du pr�fet Erignac.

La trace de celui que la justice soup�onne d'avoir tir� sur le pr�fet Claude Erignac dans une rue d'Ajaccio le 6 f�vrier 1998 et dont l'arrestation �tait devenue un enjeu politique majeur, s'�tait perdue � l'aube du 23 mai 1999 dans une bergerie de Plazzile-di-Pianella, deux jours apr�s les arrestations du reste du commando.

Colonna a �t� vu partout et attrap� nulle part: � la terrasse d'un bar en Corse, ailleurs dans l'�le, o� dit-on, il b�n�ficie de soutiens. La maison familiale de Carg�se est r�guli�rement perquisitionn�e.
Des t�moins ont cru le reconna�tre � Marseille, � Nice, en r�gion parisienne, en Loz�re vendredi encore, pr�s de la demeure familiale des Erignac mais aussi en Sardaigne, en Afrique, � Vanuatu, au Venezuela, au Costa Rica, o� des enqu�teurs sont envoy�s.
Des enqu�teurs ont affirm� leurs convictions qu'il "a pris le maquis", d'autres qu'il est loin. Tous ne sont d'accord que sur un point: un jour, ils arr�teront Yvan Colonna.

"Toutes les informations ont �t� syst�matiquement purg�es. On ne pouvait se permettre une impasse", assurait vendredi soir un enqu�teur. Celle qui a finalement abouti "�tait exploit�e depuis un certain temps", ajoutait-il.
Le seul signe de vie en quatre ans, �tait une lettre post�e dans le Val-de-Marne le 19 d�cembre 2000, envoy�e � l'hebdomadaire nationaliste U Ribombu et formellement authentifi�e comme de la main d'Yvan Colonna. La lettre ne permettait aucune localisation mais faisait taire les rumeurs sur sa mort et pr�parait sa future d�fense.

Signant "Yvan Colonna, patriote recherch�", ce p�re d'un petit gar�on s'y d�fendait d'�tre l'assassin mais exclut de se "mettre entre (les) mains" de la justice.

Sa cavale devenait un enjeu politique majeur.
Elle illustrait �galement les querelles intestines entre les diff�rents services de police, apparues au grand jour devant les assises sp�ciales o� l'ombre d'Yvan Colonna planait m�me si son cas avait �t� disjoint.

Les autres assassins pr�sum�s du pr�fet Erignac, apr�s l'avoir d�sign� devant les enqu�teurs comme le tireur, l'avaient disculp� lors des d�bats. D�sormais, Yvan Colonna est disponible pour donner sa version des faits. Mais son arrestation risque de poser un casse-t�te juridique pour la suite du proc�s Erignac.

Cette arrestation laisse n�anmoins planer le doute d�une arrestation pr�par�e. L�heure de l�arrestation (quelque temps avant le journal t�l�vis�), la date (� la fin du proc�s et avant le r�f�rendum) permet de penser qu�il y a eu des contacts entre les autorit�s et le fugitif. Et c�est tant mieux. On imagine mal une fin tragique pour Yvan Colonna. De cette mani�re, Yvan Colonna ne sera pas un martyr et ce, gr�ce � la pers�v�rance de la police et de quelques alli�s. Les Renseignements g�n�raux prennent une revanche sur la police antiterroriste qui l�avait accus� apr�s la fuite d�Yvan Colonna. C'est aussi une victoire pour le RAID, fond� par Ange Mancini, incarnation de la police r�publicaine, antinomie de la police d�exception. C�est enfin une formidable victoire pour un Nicolas Sarkozy d�sormais assur� de la victoire du � oui � au r�f�rendum de dimanche.

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