ANALYSE / La presse et le proc�s Erignac
Jun 23, 2003
Auteur: L'investigateur

Triste proc�s que celui des assassins du pr�fet Erignac. D�abord parce que les accus�s ne sont pas � la hauteur de leur geste. L� o� on attendait des desesperados on a trouv� des militants nationalistes m�diocres engonc�s dans une id�ologie incoh�rente, d�sol�s de ce qu�ils ont fait et bredouillant des excuses qui ne tiennent pas une seconde face au caract�re d�finitif de la mort qui a frapp� le 6 f�vrier 1998 le pr�fet Claude Erignac.

Triste proc�s parce que men� de mani�re lamentable par un pr�sident qui ne conna�t pas son dossier, qui ne se rappelle plus des bonnes questions � poser, qui ne sait pas mener les inculp�s sur le chemin de la v�rit�.

Triste proc�s parce que dot� d�une kyrielle d�avocats inexistants tant du c�t� de la d�fense que du c�t� de la partie civile.

Triste proc�s enfin parce que la presse ne joue pas son r�le. Les journalistes s�ennuient et on en est d�sol� pour eux. Mais eux non plus ne connaissent pas le dossier. Ils relatent � la mani�re de petits rapporteurs quand il faudrait qu�ils se conduisent en reporters. Quand et o� ont-ils pos� les questions essentielles de cette affaire confuse et dramatique ? Pourquoi n�ont-ils jamais suivi le fil de l�enqu�te qui avait �t� expos� dans de nombreux ouvrages de mani�re � �clairer leurs lecteurs ? Avouons pour notre part un grand d�pit relatif � la d�position du pr�fet Bonnet sur ce site.

Accomplissant un travail normal de journaliste, nous avons contact� ce grand commis de l��tat fran�ais qui dirigea les affaires de la Corse durant toute la p�riode de l�enqu�te relative � l�assassinat de son pr�d�cesseur. Nous lui trouvions un int�r�t suppl�mentaire : il avait recueilli un an avant les policiers de la DNAT des informations pr�cises quant � l�identit� et aux motivations des assassins. Et puis n�a-t-on pas parl� de ce pr�fet Bonnet tour � tour d�crit comme l�homme providentiel, le fonctionnaire r�pressif, le pr�fet incendiaire ?

Admettons qu�en mati�re de journalisme il en aille comme dans l�habillement : les modes passent. Mais tout de m�me, que ne s�est-on indign� de ce que ce personnage central ne soit pas cit� comme t�moin dans le proc�s de cet assassinat ? Nous avons �t� les seuls � hausser le ton.

Nous demandons au pr�fet de s�exprimer, ce qu�il fait. Et son t�moignage est une bombe. Il nous apprend qu�il avait deux informateurs. Le premier est facilement reconnaissable pour tous ceux qui s�int�ressent au probl�me corse. Et son identit� est l�affirmation que la direction du FLNC Canal historique a proprement balanc� � la police des militants qu�ils jugeaient marginaux et dangereux. Le nom de Castela vient d�abord des structures du FLNC Sudiste. C�est son dirigeant aujourd�hui d�c�d� qui d�signe la structure du nord comme la t�te pensante du complot. Puis, r�ponse du berger � la berg�re, arrive le second informateur. Bien que le pr�fet soit tr�s discret sur ce dernier et c�est tout � son honneur, nous avons tout lieu de penser qu�il s�agit d�un homme qui joue le double jeu et renseigne aussi bien la structure nordiste du FLNC que le pr�fet.

Toute la structure du proc�s pourrait �tre boulevers�e par ces r�v�lations. Croyez-vous que cela �meuve en quoique ce soit nos �minents coll�gues ? Que nenni. Pas un seul journal a repris l�information fut-ce pour citer le pr�fet. D�autant que son t�moignage tombait le jour o� les assassins pr�sum�s d�douanaient Yvan Colonna.

� un tel niveau, le d�dain s�apparente � une faute professionnelle. Et c�est dommage pour les lecteurs et pour la justice.

Pour notre part, nous continuerons � faire notre travail comme il nous semble qu�un journaliste doit le faire, avec du s�rieux mais aussi des prises de risques. Ah que l�on regrette le temps des grands reporters et des grands chroniqueurs judiciaires. Que sont ces amis devenus� Le vent a souffl� devant notre porte�

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