La cour d'assises sp�ciale de Paris, qui s'est pench� mardi sur des attentats revendiqu�s en 1994 par le FLNC-Canal historique, a tent� d'esquisser la gen�se du groupe accus� d'avoir assassin� quatre ans plus tard le pr�fet de Corse Claude Erignac. Le raisonnement a un point de force : ce sont grosso modo les m�mes personnes qui seraient impliqu�es dans les deux p�riodes. Il a une sacr�e faiblesse : les attentats avaient �t� revendiqu�s pour ceux de Mende par le FLNC Canal historique. Celui du rectorat de Paris est plus compliqu� et nous en avions d�j� parl� sur ce site.
 
 
Ces attentats � Mende (Loz�re) et � Paris, ainsi qu'une action spectaculaire dans un lyc�e de Nice, ont, selon l'accusation, �t� organis�s par Jean Castela et Vincent Andriuzzi, deux enseignants qui seraient ensuite devenus les "cerveaux" du commando qui a abattu le pr�fet de Corse le 6 f�vrier 1998 � Ajaccio.
 
Ce sc�nario, d�menti par les deux int�ress�s, repose pour beaucoup sur les d�clarations � la police en 1999 de St�phane Monti, un nationaliste corse de 32 ans poursuivi uniquement pour les actions de 1994.
 
 
Mais � l'audience, au sixi�me jour du proc�s, celui-ci s'est r�tract�. Les policiers auraient, selon lui, int�gralement invent� ses proc�s-verbaux d'interrogatoire, apr�s l'avoir frapp� et avoir menac� d'envoyer son �pouse en prison.
 
 
"Il y a eu des coups, je leur ai dit: � Vous marquez ce que vous voulez �. Et puis j'ai sign�, voil�, c'est tout", a expliqu� St�phane Monti.
 
 
Selon les premi�res d�clarations de St�phane Monti � la police, Jean Castela, professeur agr�g� d'histoire-g�ographie � Bastia, dirigeait une cellule du FLNC dans cette ville avec l'enseignant en math�matiques Vincent Andriuzzi, �galement accus� d'avoir con�u l'assassinat du pr�fet Erignac. Ces informations avaient �t� �tay�es par les d�clarations faites par le d�funt Fran�ois Santoni � un juge d�instruction.
 
 
En 1993, d�clarait initialement St�phane Monti, Jean Castela et Vincent Andriuzzi l'ont recrut� puis ont organis� les attentats de 1994, d�fini les objectifs, particip� aux pr�paratifs et r�dig� les revendications au nom du FLNC.
 
 
Jean Castela aurait �t� d�savou� pour l'attentat de Paris par le FLNC-Canal historique, qui a publi� un communiqu� d�mentant la premi�re revendication. L'enseignant, d�pit�, s'est alors d�tach� du mouvement et a entam� une "d�rive" plus violente avec d'autres, affirme l'accusation.
 
 
� l'audience, St�phane Monti a confirm� avoir �t� recrut� par le FLNC et pass� une sorte "d'examen d'entr�e" devant deux hommes en cagoule, mais il n'a pas voulu en dire les noms et a mis hors de cause Castela et Andriuzzi.
 
 
La th�se de l�attentat de la rue Curial n�est qu�en partie juste si on en croit les �crits de Fran�ois Santoni. Il a affirm� que Jean Castela avait plastiqu� le rectorat de Paris pour le mettre en difficult� alors qu�il n�gociait pour le FLNC avec Charles Pasqua. L�attentat avait �t� revendiqu� par le FLNC puis le m�me jour la revendication avait �t� d�mentie. Or, fait troublant, les deux textes �taient authentiques. Castela ne poss�dait pas l�authentification. Qui donc poss�dait le canal d�authentification sinon le responsable du secteur bastiais qui a ensuite, sous la pression de Santoni, accepter de d�mentir l�action ? 
 
Que les auteurs de l�attentat en aient �t� attrist�s est vraisemblable. Mais selon nos informations, le secteur bastiais avait commis cet attentat non pour briser les n�gociations mais pour affaiblir les secteurs sudistes.
 
 
Mais revenons sur la th�se de l�accusation. Pour elle, Jean Castela et Vincent Andriuzzi, pr�sent�s comme les instigateurs de cet assassinat, faisaient partie du commando qui a d�pos� l'engin explosif devant l'entr�e secondaire de cette annexe du rectorat de Paris.
 
 
L'attentat sera revendiqu� le jour m�me par le FLNC-Canal historique qui d�nonce le "processus de francisation" de la Corse. Mais d�s le lendemain, le mouvement clandestin d�ment �tre � l'origine de cette action revendiqu�e dans "un exc�s de pr�cipitation".
 
 
Et pour cause, son principal responsable de l'�poque, Fran�ois Santoni, n�gocie secr�tement une tr�ve avec Charles Pasqua, le ministre de l'Int�rieur, comme l'a expliqu� en juillet 2000 le leader nationaliste devant le juge d'instruction Gilbert Thiel.
 
 
C'est � la demande de l'avocat g�n�ral que le pr�sident de la cour d'assises, Yves Jacob, a lu le proc�s verbal d'interrogatoire de Fran�ois Santoni, assassin� en ao�t 2001.
 
 
Selon les propos de Fran�ois Santoni, Charles Pasqua demande que cessent les actions contre les �difices de l'Etat, en France et en Corse avant de prendre en compte les revendications nationalistes.
 
C'est donc peu dire que l'attentat est tr�s mal pris au minist�re de l'Int�rieur. D'autant que le 14 septembre 1994 au soir, le ministre et Fran�ois Santoni d�nent ensemble place Beauvau. Plat de r�sistance selon Fran�ois Santoni, un turbot grill�.
 
 
"L'attentat a �t� mal ressenti", explique-t-il au juge. Le ministre exige et obtient du FLNC qu'il d�mente sa participation � cet attentat, revendiqu� le 15 par la cellule bastiaise. Le d�menti arrivera par le canal habituel le 16 septembre.
 
 
Toujours selon Fran�ois Santoni, l'action diligent�e par la cellule de Bastia est donc confi�e � Jean Castela, professeur agr�g� d'histoire.
 
 
Le pr�sident a fait remarquer que l'accusation disposait de plusieurs autres �l�ments contre Jean Castela concernant les actions de 1994, attestant de ses d�placements sur les lieux des attentats et de la location d'une voiture � son nom au moment des faits. Castela se tait. Pri� de dire pourquoi il ne voulait pas donner les noms de ses chefs, St�phane Monti a expliqu� qu'il craignait pour sa s�curit� et celle de sa famille. Il a reconnu avoir particip� � l'action de Nice. "�a s'est bien pass�, il n'y a pas eu de violence... Aujourd'hui, il y a eu des gr�ves aussi et les gens ne sont pas traumatis�s", a-t-il dit, faisant allusion aux mouvements contre la r�forme des retraites et la d�centralisation.
 
 
Il est revenu sur ses premiers aveux aux policiers, o� il admettait avoir particip� aux attentats de Mende. Selon lui, son d�placement avec Jean Castela sur le continent le jour des faits, �tabli par l'enqu�te, avait un tout autre but: aller voir un match de football dont il n�a pas �t� capable de donner les �quipes.
 
 
Le proc�s se poursuit mercredi par l'examen de deux autres attentats, en 1997, imput�s aux accus�s, l'un contre les locaux de l'Ena � Strasbourg, l'autre contre un h�tel de Vichy. 
 
 
Impression de cafouillage une fois encore. L�accusation est molle et la d�fense tout autant. L��me de Claude Erignac doit parfois se demander ce qu�elle vient faire l�-dedans.
 
 
Seul point fort de la journ�e : cette intervention post mortem de Fran�ois Santoni qui aura �t� le v�ritable accusateur de Jean Castela. Malgr� leurs protestations les juges auront bien du mal � r�duire � n�ant la parole de ce mort si g�nant.
 
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