PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE
Le 16 janvier 1984
N� 7/2
NOTE
� l'attention de Monsieur la Pr�sident de la R�publique
OBJET: Ev�nements F.L.N.C. � SERRIERA
Les �v�nements, qui se sont d�roules samedi 14 janvier � SERRIERA, sont � mon sens, tr�s graves : � la fois au niveau de l'�chec de l'intervention des forces de l'ordre contre une provocation inacceptable et des cons�quences de cet �chec sur les relations, d�j� tendues entre la Police et la Gendarmerie, dissensions amplifi�es par les media. Il n'est pas de mon r�le de porter un jugement sur la mani�re, dont Monsieur Pr�fet BROUSSARD conduit son action en CORSE. Par contre, il ne para�t tr�s inqui�tant dans une affaire, ou il �tait le seul responsable, qu'il laisse porter sur la Gendarmerie des accusations, mettant en doute sa capacit� op�rationnelle. Aussi, il est indispensable que vous connaissiez parfaitement le d�roulement des �v�nements et ce qui a conduit � l'�chec de l'intervention.
Les conditions de l'action, dans le climat tendu qui a d� vous �tre d�crit, n'�taient pas �videntes. Aussi, le Colonel BAUSTER avait-il re�u l'ordre de disposer son escadron de telle sorte que sa pr�sence ne puisse para�tre comme une provocation. De ce fait, compte tenu de la disposition des lieux, il existait, entre ses moyens et le lieu de la c�r�monie, un champ libre important. Au cours des r�unions, qui se sont d�roul�es � la Pr�fecture en pr�sence de Monsieur le Pr�fet BROUSSARD et de ses adjoints, le dispositif du Colonel BAUSTER a �t� accept�. Les ordres de ce dernier donn�s au personnel sur le terrain, compte tenu des dispositions adopt�es, �taient: au mieux emp�cher la commission d'infractions, sinon tenter de se saisir des auteurs. A aucun moment, au cours de diverses r�unions, le Commissaire de la R�publique a expos� l'id�e du Commissaire MANCINI, consistant � infltrer des membres du S.R.P.J. � l'int�rieur de la manifestation. Lors de la derni�re r�union de vendredi soir � la Pr�fecture, le Colonel BAUSTER faisait remarquer les difficult�s qu'il rencontrait pour remplir sa mission convenablement. Lors de cette derni�re r�union, la pr�sence du petit commando du S.R.P.J., destin� � intercepter des gens du F.L.N.C., qui se manifesteraient, ne lui a pas �t� signal�e.
Le Colonel BAUSTER se trouvait, lors de la sortie du corps, loin du parvis de l'�glise aupr�s du Commissaire QUILICCI. Compte tenu de la distance et de la foule importante, qui s�paraient les forces de l'ordre de l'�glise, les premiers coups de feu, qui ont �t� tir�s avec des armes de point, non visibles � cette distance, n'ont pu �tre imm�diatement d�termin�es comme �tant le fait d'armes � feu. Le commandant de peloton, de l'endroit o� il se trouvait, a remarqu� un d�but d'�chauffour�e. Ignorant toujours la pr�sence du S.R .P.J. il pensait qu'il s'agissait d'un r�glement de comptes entre autonomistes et anti autonomistes. Malgr� tout, il a voulu intervenir et l'autorit� civile, le Commissaire QUILICCI, lui a ordonn� de ne pas le faire, en r�p�tant � plusieurs reprises: "du calme, du calme ". Quelques instants apr�s, le Colonel BAUSTER et l'adjoint de Monsieur BROUSSARD ont constat� que l'une des personnes, prises � parti au milieu de la foule, �tait Monsieur MANCINI. Ils se sont pr�cipit�s imm�diatement au contact des manifestants, suivis du peloton de Gendarmerie qui se trouvait � leur c�te, imm�diatement renforc� par le reste de l'escadron. La foule �tait particuli�rement violente et les Gendarmes ont pu difficilement d�gager le commando du S.R.P.J. Compte tenu de l'ambiance survolt�e, afin d'�viter que la situation, qu'ils ma�trisaient mal, se d�grade encore plus, l'adjoint de Monsieur BROUSSARD et le Colonel BAUSTER ont d�cid� de faire refluer l'escadron � lever le dispositif de bouclage et de ce fait les auteurs ont pu se fondre dans la foule, laissant sur place une arme de poing et de nombreuses munitions.
Me fiant � la concision du Colonel BAUSTER, dont je connais la rigueur militaire, je tire les conclusions suivantes. Monsieur le Pr�fet BROUSSARD �tait parfaitement inform� de l'action du commando, men�e par le Commissaire MANCINI et les huit hommes du S.R.P.J. Confiant en ce dispositif, ils �taient persuad�s de proc�der � des arrestations, en op�rant par surprise, sans que la Gendarmerie ne soit inform�e et surtout puisse participer � l'op�ration. Totalement tenu � l'�cart, le Colonel BAUSTER ne disposait d'aucun �l�ment, lui permettant d'imaginer une seule seconde cette entreprise. On ne pouvait donc, � mon avis, raisonnablement compter que la position des Gendarmes puisse, au cas o� cette op�ration tournerait court, leur permettre de r�ussir � pr�ter main-forte au S.R.P.J. dans son entreprise. C'est ce qu'il s'est produit. Aussi, rendre la Gendarmerie responsable de l'�chec de ce coup de main est aussi injuste qu'irresponsable. Ce n'est pas en aidant la presse � trouver les �l�ments lui permettant d'entretenir la guerre des polices, que l'on peut arriver � l'efficacit�. Seule la coordination, en dehors de toute querelle de clocher ou d'int�r�t de chef, peut nous permettre de r�ussir dans une lutte difficile. Les forces de police rencontrent d�j� assez de difficult�s dans leurs missions, sans qu'il soit besoin les alourdir avec des querelles intestines st�riles.
Manifestement dans cette op�ration, il revenait au Commissaire de la R�publique d'informer l'autorit� de Gendarmerie de la mission confi�e au S.R.P.J. Si le Colonel BAUSTER avait poss�d� cet �l�ment, sans doute son dispositif aurait �t� notablement modifi� et de ce fait, il se serait trouv� en mesure d'intervenir au moment o� le Commissaire MANCINI se trouvait d�bord�. Je suis persuad� que les gens qui ont men� cette action �taient certains de r�ussir leur coup et l'audace de l'op�ration auraient �t� relev�e � juste titre pour la plus grande gloire de leurs auteurs. Comme cela n'a pas fonctionn�, il faut bien trouver un responsable. II est facile de s'en prendre � un corps disciplin� comme la Gendarmerie, dont on sait tr�s bien qu'il ne s'�panchera pas dans la presse. L'attitude des autorit�s me para�t dans cette affaire compl�tement irresponsable et il est miraculeux que tout cela n'ait pas d�g�n�r�.
Le Chef d'escadron PROUTEAU
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