Sarkozy: "J'ai commis deux erreurs" en Corse
Jan 20, 2004
Le ministre de l'Int�rieur Nicolas Sarkozy a affirm� qu'il avait commis "deux erreurs" sur le dossier corse, en omettant de renouveler l'�quipe pr�fectorale d'une part, d'autre part en pensant que le r�f�rendum �tait une "bonne id�e", dans une interview � L'Express parue hier.

� propos de la Corse, "j'ai commis deux erreurs: j'aurais d� renouveler l'�quipe pr�fectorale et j'ai cru que le r�f�rendum �tait une bonne id�e. C'en �tait une de donner la parole aux Corses mais le climat de peur �tait � un point que je n'imaginais pas. La parole n'�tait pas libre", a-t-il affirm�.

"Une fois l'�chec (du oui au r�f�rendum) , je n'ai pas renonc�", a-t-il ajout�.

"Aujourd'hui, il y a moins d'attentats, M. (Charles) Pieri et son entourage rendent des comptes � la justice. Nous sommes en train d'assainir en profondeur la soci�t� corse. Chacun reconna�t que nous sommes en train de regagner le terrain perdu par la R�publique en Corse depuis trente ans", a-t-il assur�.

Le ministre de l'Int�rieur a �galement expliqu� que "deux choses" l'avaient emp�ch� de r�former le mode de scrutin sur l'�le en vue des �lections r�gionales de mars: "le d�lai" et "la situation de la droite et de la gauche".

"Je ne serai pas le ministre qui prendra pour la Corse le risque d'une prime de 25% (ndlr: accord�e � celui qui arrive en t�te lors du premier tour de l'�lection) comme le pr�voit le mode de scrutin sur le continent. Dans l'�tat actuel des choses, � qui aurait-elle profit� ?", a-t-il affirm�.

Selon lui, "un jour, quand la Corse aura �t� d�barrass�e des mafieux, il faudra faire une place � des autonomistes d�mocrates et honn�tes".

Ces d�clarations am�nent plusieurs remarques. Nicolas Sarkozy emport� par une pr�tention qui lui est coutumi�re a trop tendance � s�accorder des pouvoirs de d�miurge. Il serait responsable � part enti�re des victoires et des d�faites de soci�t�s enti�res. Il finit par en oublier les pesanteurs sociologiques et historiques. M�me si son orgueil doit en souffrir, nous lui rappellerons que la Corse existait avant son arriv�e et continuera de vivre apr�s son d�part du minist�re de l�Int�rieur. Le jugement du ministre est extr�mement dur envers la pr�c�dente �quipe pr�fectorale men�e par Dominique Dubois dont il reste encore en place un homme dont les sentiments d�hostilit� envers les Corses sont � peine voil�s ; le secr�taire g�n�ral Paul Andr� Durand. Il est vrai que le nouveau pr�fet a fait preuve d�un dynamisme tout � fait remarquable.

Notre deuxi�me remarque tient � l�analyse que fait le ministre de l��chec du r�f�rendum. On ose esp�rer que sa remarque est de pure circonstance et qu�il ne croit pas un mot de ses explications. Croire que le non aurait �t� caus� par la peur est ridicule. La victoire du � non � emport�e � mille cinq cents voix pr�s (ce qui est d�risoire) a d�abord pour explication le conservatisme qui s�vit en Corse et qui est une r�alit�. La population �g�e a peur de ce qui change. La deuxi�me explication est l�ancrage historique de la Corse dans le syst�me d�assistanat. La troisi�me est la p�riode du r�f�rendum marqu�e par la gr�ve des fonctionnaires et le proc�s des assassins du pr�fet Erignac. Enfin, le ministre oublie ses propres erreurs : �tre venu trop souvent dans une �le qu�il voulait autonome. Ses interventions � r�p�tition, ses admonestations ont fini par irriter jusqu�aux partisans du � oui �. L�arrestation d�Yvan Colonna la veille du scrutin est apparue comme un � truc �. La manifestation de Bastia qui a vu le Premier ministre et le ministre de l�int�rieur refoul� sur des chaises d�a�roport a marqu� les esprits.

Mais la peur a peu jou� sinon a contrario en favorisant le non. De l� � dire que les Corses ne pouvaient pas s�exprimer il y a un foss� qui est insultant pour les Corses. Le � non � a tout simplement exprim� un sentiment l�g�rement dominant dans l��le quelles que soient les circonstances. Point barre.

La derni�re r�flexion de Nicolas Sarkozy relative aux autonomistes honn�te provoque de la m�me mani�re une r�elle irritation. "un jour, quand la Corse aura �t� d�barrass�e des mafieux, il faudra faire une place � des autonomistes d�mocrates et honn�tes" pr�cise-t-il. Que le ministre nous excuse mais ce n�est pas � lui de dicter les choix de la d�mocratie. Si les Corses ont envie d�accorder la victoire aux nationalistes, personne n�aura le droit de contester leur choix. Cela posera ind�niablement un probl�me de soci�t�, certainement pas de magouilles �lectorales. Il y a d�ailleurs de fortes chances pour que les nationalistes entrent � l�ex�cutif apr�s les �lections territoriales.

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