Le tr�s sinueux parcours de Paul Giacobbi, le d�put� radical de gauche de la Haute Corse
Jan 15, 2004
Paul Giacobbi se dit de gauche et fait alliance avec Jean-Claude Guazzelli un partisan affirm� de la privatisation � tout crin. Il donne une interview au mensuel Corsica dans lequel il affirme que bien qu�ayant fait campagne pour le oui il a �t� tent� par le non. Itin�raire d�un contorsionniste. Nous avons re�u l�avis d�un lecteur de Haute-Corse.

Paul Giacobbi pourrait bien lasser jusqu�� son propre �lectorat. Cet homme d�apparence charnue, a souvent tendance � prendre les Corses pour des imb�ciles qu�il dominerait du haut de son immense intelligence. Lui qui devait r�volutionner la politique en Corse est en train de s�y prendre les pieds en montrant au bon peuple la face cach�e de son �norme personnalit� : la duplicit�. Il est un proverbe corse qui dit que les notables sont comme les poutres : ils ont quatre c�t�s. Paul Giacobbi en est l�incarnation.

Cet homme a fait campagne pour le oui avec une forte conviction allant contre la tendance profonde de son �lectorat. Aujourd�hui il revient sur ce choix au risque de donner l�impression d�une inconsistance majeure. Il s�affirme d�fenseur inconditionnel du service public mais s�allie avec Jean-Claude Guazzelli, directeur du Cr�dit Agricole dans sa pire �poque, grand argentier lib�ral de la Collectivit� corse et pourfendeur de la fonction publique.

Il d�nonce la d�rive mafieuse mais jamais ne s�attaque � la voyoucratie de la Brise de Mer dont les deux fr�res de Jean-Claude Guazzelli sont soup�onn�s d��tre les piliers. Paul Giacobbi doit sa place de pr�sident du Conseil g�n�ral, enlev� � la cosaque � Paul Natali, au retournement d��un �lu de droite de la r�gion des barons de la Brise de Mer.

Il fustige la violence clandestine du FLNC non sans s��tre alli� aux nationalistes de la Cuncolta quand cela l�arrangeait.

Aujourd�hui son arrogance pose probl�me et joue m�me pour son adversaire �mile Zuccarelli qui a l�avantage d��tre droit dans ses positions. Paul Giacobbi pr�tend avoir pour lui le parti radical de gauche dont on est ravi au passage de savoir qu�il existait encore. Rien n�est moins s�r m�me si les pr�c�dents choix de Zuccarelli en faveur de Jean-Pierre Chev�nement ne plaide pas en sa faveur.

Il est aujourd�hui certain que la liste de Paul Giacobbi passera le cap du premier tour. Mais � quel prix. Nombreux en Haute Corse sont ceux qui s�interrogent sur ce que serait la r�gion dirig�e par une telle girouette dont la grande qualit� est d�indiquer d�o� vient le vent �lectoral.

Inconsistant en politique, personnellement instable, Paul Giacobbi croit que son intelligence et l�arrogance qu�il affiche envers ceux qui ne sont pas d�accord peuvent tenir lieu d�argument. Il a tort. Et les �lections me donneront raison.

Paul G.




***


L�interview de Paul Giacobbi parue dans Corsica
Paul Giacobbi fustige un axe Natali-Zuccarelli


Celui que beaucoup consid�rent comme le prochain patron de l�ex�cutif de Corse met en cause le maire de Bastia dans la d�faite de son p�re, en 1992, � la t�te du conseil g�n�ral de la Haute-Corse. Et il admet que lui-m�me a �t� � deux doigts de voter �non� au r�f�rendum du 6 juillet

Lorsqu�on commence l�entretien avec Paul Giacobbi en lui lan�ant, comme par provoc, � vous rendez-vous compte de ce que vous avez fait en un rien de temps ? �, il ne vous laisse pas poursuivre. C�est sa fa�on de pr�venir une attaque que de choisir le terrain de l�explication. On l��coute. Forc�ment. �Si je vous �tonne, c�est surtout parce que, depuis pas mal d�ann�es, j�ai beaucoup travaill� avec des m�thodes qui ne sont si courantes en Corse et qui consistent � ne pas privil�gier les uns par rapport aux autres, mais dans un souci exclusif d�efficacit� pour le plus grand nombre. �

Je pensais plut�t aux cons�quences de votre action qui a boulevers� le paysage politique insulaire. Par exemple, vous avez mis un terme � l�axe Giacobbi-Zuccarelli qui paraissait solide et vous assurait � tous deux l�essentiel du pouvoir en Haute-Corse�
Vous posez mal les probl�mes. Vous consid�rez que la vie politique repose sur des alliances entre des personnalit�s pour se partager le pouvoir. Moi, je consid�re qu�elle consiste � se mettre au service des citoyens sur la base d�id�es claires et d�une certaine cr�dibilit� dans l�action. Par cons�quent, �a ne m�int�resse de savoir quels axes existent ou n�existent pas. Si tant est qu�il y ait un axe en Haute-Corse, c�est plut�t un axe Natali-Zuccarelli qui, � l��vidence, depuis 1992, pratique cette politique de partage du pouvoir. Je dis bien depuis 1992, c�est-�-dire depuis le moment o� ils se sont entendus pour �vincer un certain� Fran�ois Giacobbi.

Alors l� vous m��patez�
C�est pourtant la stricte v�rit�.

En tout cas, l�union de la gauche, scell�e par votre p�re et Jean Zuccarelli et qui, autour de la ville de Bastia, a �t� valid�e par quarante ans de lutte en commun a vol� en �clats�
Ce n�est pas moi qui porte atteinte � l�union de la gauche. J�ai conduit une action qui a permis que nous nous rapprochions beaucoup du parti socialiste. Et, pour tout vous dire, je me trouve parfaitement bien en tant que d�put� apparent� socialiste comme tous les autres d�put�s radicaux de gauche sauf un, �mile Zuccarelli. En revanche, une partie des radicaux en Corse a voulu une rupture tr�s brutale avec le parti socialiste. � l'�gard du parti communiste, je n�ai pas de difficult�s particuli�res. Il y a un de ses membres au conseil g�n�ral de la Haute-Corse, Ange Rov�re, qui est parfaitement loyal, si ce n�est qu�aujourd�hui on veut � tout prix le battre aux �lections cantonales alors que moi je le soutiendrai. Qui fait voler quoi en �clats ? Je m�interroge.

Il y a pourtant le feu � la f�d�ration radicale de la Haute-Corse�
Je vous rappelle que le P.R.G, parti national, a pris la d�cision de pr�senter un candidat � la derni�re �lection pr�sidentielle. J�ai naturellement soutenu ce choix alors que d�autres ont pr�f�r� choisir un candidat curieux pour ne pas dire inqui�tant, c��tait Jean-Pierre Chev�nement. Par ailleurs, il me semble qu�il est interdit de vouloir renverser un ex�cutif lorsqu�on appartient au m�me parti que celui qui exerce les responsabilit�s � la t�te de cet ex�cutif. C�est ce que le pr�sident du parti radical a rappel� de fa�on tr�s pr�cise � un certain nombre de responsables en Haute-Corse. Ce n�est donc pas moi le boutefeu ; pour les incendiaires, il faut voir ailleurs.

Vous vous �tes quand m�me pay� le luxe, pratiquement seul � gauche dans ce cas, de vous situer aux c�t�s de Bush lors du coup de force des Am�ricains en Irak�
En quoi est-il choquant qu�un homme de gauche s�oppose � une dictature qui n�a pas eu beaucoup d��quivalent ? Je ne suis pas situ� �aux c�t�s� de Busch dans ce que je ne consid�re pas comme �un coup de force�. Mais il nous fallait sans doute �tre moins excessifs dans nos positions diplomatiques de mani�re � �viter l�isolement de la France. On le v�rifie aujourd�hui, il n�y a plus un seul pays pour suivre la France : la Russie l�a compl�tement abandonn�e sur ce terrain-l�, l�Allemagne aussi et dans l�Europe des vingt-cinq personnes n�est sur ce terrain-l�.

J�ai envie de vous demander : et l�h�ritage de votre p�re dans tout �a ?
Je ne suis pas un h�ritier. Quand j�ai �t� �lu conseiller g�n�ral en 1997 et qu�un an plus tard je suis devenu pr�sident du conseil g�n�ral, il me semble me souvenir que la majorit� �tait de droite avec Paul Natali�

�Avec la complicit� d��mile Zuccarelli, pr�tendez-vous�
Je persiste et je signe et je m�en expliquerai pendant la campagne. Ce qui s�est pass� en 1992, je ne le supporte pas et mon pauvre p�re ne le supportait pas aussi.

Vous disiez : �Je ne suis pas un h�ritier��
Je suis uniquement l�h�ritier d�un certain nombre de valeurs sur la Corse et sur la France. Par exemple : je suis un partisan de l��tat de droit et du respect des lois. Je suis aussi l�h�ritier d�un franc-parler : sur la violence, d�s 1982 date de mon entr�e en politique, j�ai pris une position sans concession ; de m�me, je m�oppose, depuis toujours, � la notion communautariste de reconnaissance juridique de peuple corse.

Et sur la d�centralisation, �tes-vous sur la m�me longueur d�onde que votre p�re ?
Je suis sans doute plus d�centralisateur que mon p�re. Encore que je n�en suis pas si s�r. Mon p�re �tait tout � fait d�accord avec la d�centralisation de 1982.

Le giaccobisme n�est donc pas un jacobinisme�
D�abord, je ne suis pas giacobbiste ; je ne veux pas entendre parler de d�finition de la politique � partir d�un nom de famille. Ensuite, mon p�re n��tait pas un jacobin : c��tait tout le contraire, il repr�sentait le pouvoir local face au pouvoir d��tat ; ce qui ne l�emp�chait nullement d��tre un grand r�publicain. On a d�ailleurs tort d�opposer la d�centralisation et la R�publique.

Et ces larmes, � peine contenues, de votre p�re � la tribune du s�nat lors d�un d�bat sur le particularisme de la Corse, elles se raccrochaient � quoi selon vous ?
Il faut bien se souvenir que mon p�re �tait un Fran�ais qui avait combattu pour la France. Il a �t� condamn� � mort par contumace par un tribunal fran�ais pour� terrorisme. Ce n�est pas commun ! Il savait ce que c��tait que risquer sa vie pour son pays. C��tait un patriote. Et la seule id�e qu�on puisse lui dire : vous �tes moins fran�ais que les autres, lui �tait absolument insupportable.

Th�oriquement, vous avez fait encore plus fort : depuis quatre ans, vous chassez sur les terres des nationalistes en reprenant, � votre compte, hors l�ind�pendance et la reconnaissance juridique du peuple, l�essentiel de leurs revendications�
Hors l�ind�pendance et la reconnaissance juridique du peuple corse, dites-vous. Autrement dit : � part 98% de leurs revendications, je suis d�accord sur les 2% restants. Serais-je r�volutionnaire parce que je suis d�centralisateur ? Ces th�ses sur la d�centralisation ont �t� tr�s largement vot�es au parlement et par le congr�s, ce qui a permis d�ailleurs de r�viser la constitution. Et le point de vue que je soutenais est aujourd�hui non seulement op�rant pour la Corse, mais pour l�ensemble de la France. Il me semble que je suis en parfaite coh�rence.

Comment fait-on pour d�gommer tout le monde : Paul Natali de la pr�sidence du conseil g�n�ral de la Haute-Corse qu�il avait ravi � votre p�re, Paul Patriarche du si�ge de d�put� de la deuxi�me circonscription de la Haute-Corse ?
Je ne suis pas capable de tour de force. J�ai gagn� sur la fid�lit� � mes id�es. C�est �a qui �tonne, voire qui exasp�re. Les citoyens ont sans doute envie d��lus qui leur fassent partager des convictions et qui aient une cr�dibilit� dans l�action par opposition � d�autres qui ambitionnent d�occuper des postes et le plus longtemps possible.

En revanche, vous avez �t� stopp� net lorsque dans la premi�re circonscription de la Haute-Corse, vous avez essay� de faire chuter �mile Zuccarelli au profit de Fran�ois Vendasi�
Vous vous trompez. J�ai tout fait pour promouvoir l�entente. �a n�a pas fonctionn� et j�ai alors essay� de respecter la plus stricte neutralit�. �a n�a �t� pour moi ni �chec ni un succ�s, mais la preuve qu�il y avait bien une crise assez profonde au sein du parti radical. Tout simplement parce que certains sont dans la lign�e du p�re Ubu: ils veulent faire passer les gens � la trappe. Ce fut le cas, quoique de fa�on discr�te, pour Fran�ois Giacobbi avec l�aide des socialistes et de Paul Natali ; ensuite, on n�est pas content des socialistes, � la trappe aussi ; puis, on se brouille avec Fran�ois Vendasi ; aujourd�hui, c�est Ange Rov�re, premier adjoint � Bastia, qu�on veut sacrifier aux cantonales. Mais y aura-t-il une trappe assez large pour m�y faire passer ? Ce n�est pas �vident.

Le � non� au r�f�rendum de juillet dernier vous a quand m�me fait vaciller�
Vous savez, j�ai �t� moi aussi � deux doigts de voter �non�.

Quoi ?
�a ne vous a pas �chapp�. Ne faites pas l�innocent. Au moins en deux occasions : lors de la tentative de tripatouillage du mode de scrutin des territoriales et lorsqu�il est apparu que Bastia perdrait sa qualit� de pr�fecture et qu�il n�y aurait plus de services d�partementaux de l��tat en Haute-Corse sauf d�l�gu�s. Nous n�avons obtenu des garanties qu�in extremis de la part du gouvernement.

Mais quand le �non� l�a finalement emport�, �a vous en a fichu un coup ?
Je suis un d�mocrate et je ne penserais jamais que j�ai raison et que le peuple � tort. C�est moi qui avais tort, c�est le peuple qui a eu raison. Le peuple a dit �non� et effectivement il ne s�est pas tromp�. Il a bien fait, dans les circonstances o� nous �tions, de rejeter le r�f�rendum. Il est d�ailleurs bien pr�f�rable, � une telle majorit�, que le �non� l�emporte.

Il y a quelques semaines, vous balanciez une lettre-bombe contre les clandestins. Personne n�a jamais cru que vous partagiez leurs th�ses et encore moins leurs m�thodes, cependant il n�est pas facile de comprendre de quelle logique politique rel�ve cette mise en cause des F.L.N.C�
Je suis �tonn� que vous n�ayez pas compris : je dis la m�me chose sur la violence tous les six mois depuis vingt ans. Ce qui a peut-�tre chang�, c�est mon talent litt�raire.

Et lorsque vous terminiez votre lettre en craignant pour votre vie, c�est quand m�me nouveau dans la dramaturgie�
J�ai tenu � cette r�f�rence parce que, dans ce pays, j�en ai marre qu�� chaque fois qu�on veut dire quelque chose, il y a toujours quelqu�un pour vous monter le pire. Moi, je pr�viens tout le monde : je sais tr�s bien ce qui peut m�arriver, mais rien ne fera changer d�avis. Alors, il est possible que si vous �tiez placier en assurances, vous ne vous battriez pas pour me faire signer une police d�c�s. Mais, je vous assure, � mon tour, que lorsqu�on est mari� et p�re de famille, on n��crit pas une telle lettre par calcul politique et, avant de la publier, j�ai beaucoup r�fl�chi.

� lire un de vos derniers communiqu�s, il semble bien que pour vous, du moins en Corse, le clivage droite-gauche n�a plus grande signification�
Ce n�est pas ce que je dis et incontestablement j�appartiens � la sensibilit� de la gauche. Cela dit, il n�y a pas une mani�re de gauche ou de droite de g�rer une r�gion comme la Corse. Et nous n�avons pas en Corse tant de gens capables pour qu�on se prive de talents d�s lors qu�on veut obtenir des r�sultats concrets.

C�est la raison de votre rencontre avec Jean-Claude Guazzelli au-del� des int�r�ts partisans�
Essayez donc de me trouver, en Corse, quelqu�un qui ait � la fois un peu plus de capacit� de travail, un peu plus de comp�tences et qui ait obtenu autant de r�sultats que Jean-Claude.

Nous sommes en avril et vous �tes �lu � la pr�sidence de l�ex�cutif. Vous changez quoi qui va am�liorer la vie des Corses � br�ve �ch�ance ?
Ce qui me rassure, c�est que j�aurai avec moi celui � qui est imputable ce que la majorit� sortante a fait de bien. Mais, � br�ve �ch�ance, il n�est pas possible de changer grand-chose. On va, en tout cas, moins parler et se mettre � travailler sur des dossiers concrets d�autant que les financements sont l� et qu�il convient de savoir les utiliser au mieux. Mais, il faudra attendre au moins la fin d�une premi�re mandature pour voir les effets b�n�fiques de notre politique.
Joseph-Guy Poletti

TOUT LE DOSSIER CORSE

�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s